Hypanatoi Konostinos
Manticore - Aventurier
Bronze
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- Date d'inscription :
- 17/11/2021
- Gils :
- 27970
- Disponibilité Rp :
- Je cherche. N'hésitez pas à me MP.
- Messages :
- 883
- Métier :
- Aventurier
- Couleur d'Essence :
- Rouge
- Familia :
- /
- Style d'Arme :
- Lance longue
- Rang :
- Obsidienne @@@@@
- Puissance d'Essence :
- 45627
(45000 points, essence rouge, rang A)
Il ne s’était jamais autant questionné sur la nature des mortels et des immortels que depuis qu’il s’était incarné sur Portalia. Cette terre inutile, oubliée des divins, l’aurait presque transformé en philosophe, lui qui avait toujours professé n’avoir que peu d’intérêt pour cette discipline abstraite. Non pas qu’il la méprisât, certainement pas, mais il lui avait toujours préféré d’autres domaines plus directement applicables. Il était un homme de guerre. La stratégie. Le discours. L’organisation des troupes et des convois. Tout cela était de son fait. Et puis, les choses sur son monde étaient plus simples. Son rôle était parfaitement défini, la latitude qu’il possédait parfaitement circonscrite. Il savait comment agir en toute circonstance, et dans les rares cas qui pouvaient le surprendre, une brève méditation révélait immanquablement le chemin rectiligne qui devait le mener à l’accomplissement.
Ici, tout était tortueux. Personne ne parlait franchement. Il comprenait la nécessité d’intriguer ; là encore, ce n’était pas une discipline qui lui convenait. Mais quand même le plus ignare des roturiers de cette cité se prenait immanquablement pour un parangon d’esprit et de sagesse, dispensant allègrement ses enseignements, que ce soit en matière de politique ou pour commenter les problèmes du jour, le paragoï devait avouer que tout cela l’amenait à se questionner. Principalement sur l’écart majeur qui existait entre ce qui était professé et ce que les gens étaient. Car c’était là une autre constante.
Il suffisant pour s’en convaincre de percevoir l’individu qui s’échinait devant lui. Misérable et couvert d’une odeur de transpiration et de pisse, le gamin devait avoir vingt à peine. Peut-être moins. Il avait parfois du mal à estimer précisément l’âge des autochtones. Il était jeune, en tout cas. Une voix débarrassée des trémolos embarrassants de l’adolescence, mais qui n’avait pas encore été érodée par l’âge, qui gardait de sa clarté résonnante. Il avait essayé de lui insuffler une note d’orgueil, quand Hypanatoi s’était porté à sa rencontre. De lui imprimer un mouvement de bravoure, aussi mal à propos que rapidement effacé. Hypanatoi le savait coupable. Il le savait faire partie d’un groupe criminel appartenant au réseau plus large responsable du calvaire de Kemat. Et par conséquent, l’honneur aurait normalement voulu qu’il meurt. L’affaire était simple, le verdict évident. Mais le jeune homme avait exprimé qu’il était rentré récemment dans le groupe. Qu’il n’était pas responsable. Et qu’il connaissait malgré cela quelque chose d’intéressant, qu’il avait les faveurs d’une personne haut-placé.
Le paragoï avait au début douté de ses dires ; il ne voyait pas quel intérêt une femme responsable d’un réseau criminel aussi important pouvait bien concevoir pour ce genre d’insecte pleurnichard. Et puis, le jeune homme lui avait décrit leurs escapades nocturnes. Hypanatoi ne savait s’il devait le croire. Si ce n’était pas là une tentative désespérée de prolonger sa misérable existence. Mais toute cette affaire avait démarré parce qu’un portalien s’était révélé incapable de contrôler ses pulsions primaires. Qu’une faille existe dans leurs défenses pour la même raison était loin d’être impossible. Dans le pire des cas, le jeune garçon le ménerait dans une embuscade. Et donc, vers d’autres de ses complices.
Il pouvait donc vivre, pour l’heure.
Mais ce n’était pas cela qui le perturbait réellement. Il posa brutalement sa main entre ses omoplates, le poussant en avant pour lui faire accélérer le pas. Le gamin manqua de s’écraser sur le sol crasseux de la rue borgne, mais ne protesta pas, le message visiblement clair.
Ce qui le perturbait, c’était comment tout cela pouvait tenir. Comment chaque personne vivant sur ce monde acceptait la supercherie des autres dans l’espoir qu’ils acceptent la leur. Comment tout cet édifice ressemblait plus à un travail impossible d’équilibriste qu’à des fondations solides. Comment, parce que chaque personne comprenait en le vivant l’enjeu fondamental de la chose, cela ne devenait tout simplement pas intenable.
« Tu sais que tu vas tout de même mourir ? questionna-t-il distraitement. »
Son guide improvisé s’immobilisa, le cuir usé de ses bottes clapotant dans une flaque avec un bruit hésitant. Il eut un mouvement avorté, et Hypanatoi crut un moment qu’il avait eu la mauvaise idée de faire de la résistance. Puis, il fondit en larmes, des sanglots irréguliers et baveux secouant son tronc, son bras réussissant finalement à s’appuyer contre le mur. Hypanatoi grogna. Visiblement, il ne savait pas. Ou alors, il faisait exprès de l’ignorer. Mais l’enchantement qui suspendait leur situation, en tout cas, était rompu. Sa main se posa de nouveau sur l’épaule du jeune homme, doucement mais fermement, et le secoua.
« Pas de ça. Affronte la conséquence de tes choix avec un peu de fierté. Ca sera plus digne. »
Ses paroles n’eurent pas l’effet escompté, et il hésita un bref moment, avant de reprendre :
« C’est quoi ton nom ?
- Hein ?
- Ton nom.
- Janksen.
- Bien. Tu veux bien avancer, Janksen ? J’aimerais en finir rapidement, et ce serait mieux pour toi aussi. »
Là encore, son intervention ne fut pas couronnée de succès. Malgré le fait qu’il eut tenté d’ériger un rapport entre lui et son interlocuteur, et qu’il lui ait offert un bénéfice évident, ce dernier semblait trop tétanisé pour réagir favorablement. Agacé, Hypanatoi raffermit sa prise sur son épaule, jusqu’à sentir s’échapper d’entre les lèvres du garçon des bruits peinés et laborieux.
« Avance, avant que la pitié que tu m’inspires ne soit surpassée par mon irritation. »
Le résultat fut immédiat, et ils se remirent en chemin. Au moins certaines méthodes restaient-elles fonctionnelles. Eloignant de gestes répétés de la main les quelques badauds qui n’avaient pas la présence d’esprit de s’écarter immédiatement de son passage, il se remit à progresser à bon rythme. L’homme devait les mener à une taverne, dans laquelle il avait apparemment rendez-vous avec sa protectrice. De là, les choses progresseraient simplement. Il poussa la porte de l’établissement miteux, tentant de ne pas manifester de manière audible le dégoût que lui inspirait son atmosphère. Au moins l’extérieur était-il aéré. Puis, il gagna une table, accompagné de son nouveau camarade. Il doutait que la supercherie dure longtemps. Il n’en avait de toute façon pas besoin. Une fois que la patronne du gamin serait identifiée, fuir ou lutter ou se rendre ne changerait rien à l’issue finale de leur confrontation.
Dernière édition par Hypanatoi Konostinos le Jeu 28 Mar - 5:27, édité 1 fois
Il ne s’était jamais autant questionné sur la nature des mortels et des immortels que depuis qu’il s’était incarné sur Portalia. Cette terre inutile, oubliée des divins, l’aurait presque transformé en philosophe, lui qui avait toujours professé n’avoir que peu d’intérêt pour cette discipline abstraite. Non pas qu’il la méprisât, certainement pas, mais il lui avait toujours préféré d’autres domaines plus directement applicables. Il était un homme de guerre. La stratégie. Le discours. L’organisation des troupes et des convois. Tout cela était de son fait. Et puis, les choses sur son monde étaient plus simples. Son rôle était parfaitement défini, la latitude qu’il possédait parfaitement circonscrite. Il savait comment agir en toute circonstance, et dans les rares cas qui pouvaient le surprendre, une brève méditation révélait immanquablement le chemin rectiligne qui devait le mener à l’accomplissement.
Ici, tout était tortueux. Personne ne parlait franchement. Il comprenait la nécessité d’intriguer ; là encore, ce n’était pas une discipline qui lui convenait. Mais quand même le plus ignare des roturiers de cette cité se prenait immanquablement pour un parangon d’esprit et de sagesse, dispensant allègrement ses enseignements, que ce soit en matière de politique ou pour commenter les problèmes du jour, le paragoï devait avouer que tout cela l’amenait à se questionner. Principalement sur l’écart majeur qui existait entre ce qui était professé et ce que les gens étaient. Car c’était là une autre constante.
Il suffisant pour s’en convaincre de percevoir l’individu qui s’échinait devant lui. Misérable et couvert d’une odeur de transpiration et de pisse, le gamin devait avoir vingt à peine. Peut-être moins. Il avait parfois du mal à estimer précisément l’âge des autochtones. Il était jeune, en tout cas. Une voix débarrassée des trémolos embarrassants de l’adolescence, mais qui n’avait pas encore été érodée par l’âge, qui gardait de sa clarté résonnante. Il avait essayé de lui insuffler une note d’orgueil, quand Hypanatoi s’était porté à sa rencontre. De lui imprimer un mouvement de bravoure, aussi mal à propos que rapidement effacé. Hypanatoi le savait coupable. Il le savait faire partie d’un groupe criminel appartenant au réseau plus large responsable du calvaire de Kemat. Et par conséquent, l’honneur aurait normalement voulu qu’il meurt. L’affaire était simple, le verdict évident. Mais le jeune homme avait exprimé qu’il était rentré récemment dans le groupe. Qu’il n’était pas responsable. Et qu’il connaissait malgré cela quelque chose d’intéressant, qu’il avait les faveurs d’une personne haut-placé.
Le paragoï avait au début douté de ses dires ; il ne voyait pas quel intérêt une femme responsable d’un réseau criminel aussi important pouvait bien concevoir pour ce genre d’insecte pleurnichard. Et puis, le jeune homme lui avait décrit leurs escapades nocturnes. Hypanatoi ne savait s’il devait le croire. Si ce n’était pas là une tentative désespérée de prolonger sa misérable existence. Mais toute cette affaire avait démarré parce qu’un portalien s’était révélé incapable de contrôler ses pulsions primaires. Qu’une faille existe dans leurs défenses pour la même raison était loin d’être impossible. Dans le pire des cas, le jeune garçon le ménerait dans une embuscade. Et donc, vers d’autres de ses complices.
Il pouvait donc vivre, pour l’heure.
Mais ce n’était pas cela qui le perturbait réellement. Il posa brutalement sa main entre ses omoplates, le poussant en avant pour lui faire accélérer le pas. Le gamin manqua de s’écraser sur le sol crasseux de la rue borgne, mais ne protesta pas, le message visiblement clair.
Ce qui le perturbait, c’était comment tout cela pouvait tenir. Comment chaque personne vivant sur ce monde acceptait la supercherie des autres dans l’espoir qu’ils acceptent la leur. Comment tout cet édifice ressemblait plus à un travail impossible d’équilibriste qu’à des fondations solides. Comment, parce que chaque personne comprenait en le vivant l’enjeu fondamental de la chose, cela ne devenait tout simplement pas intenable.
« Tu sais que tu vas tout de même mourir ? questionna-t-il distraitement. »
Son guide improvisé s’immobilisa, le cuir usé de ses bottes clapotant dans une flaque avec un bruit hésitant. Il eut un mouvement avorté, et Hypanatoi crut un moment qu’il avait eu la mauvaise idée de faire de la résistance. Puis, il fondit en larmes, des sanglots irréguliers et baveux secouant son tronc, son bras réussissant finalement à s’appuyer contre le mur. Hypanatoi grogna. Visiblement, il ne savait pas. Ou alors, il faisait exprès de l’ignorer. Mais l’enchantement qui suspendait leur situation, en tout cas, était rompu. Sa main se posa de nouveau sur l’épaule du jeune homme, doucement mais fermement, et le secoua.
« Pas de ça. Affronte la conséquence de tes choix avec un peu de fierté. Ca sera plus digne. »
Ses paroles n’eurent pas l’effet escompté, et il hésita un bref moment, avant de reprendre :
« C’est quoi ton nom ?
- Hein ?
- Ton nom.
- Janksen.
- Bien. Tu veux bien avancer, Janksen ? J’aimerais en finir rapidement, et ce serait mieux pour toi aussi. »
Là encore, son intervention ne fut pas couronnée de succès. Malgré le fait qu’il eut tenté d’ériger un rapport entre lui et son interlocuteur, et qu’il lui ait offert un bénéfice évident, ce dernier semblait trop tétanisé pour réagir favorablement. Agacé, Hypanatoi raffermit sa prise sur son épaule, jusqu’à sentir s’échapper d’entre les lèvres du garçon des bruits peinés et laborieux.
« Avance, avant que la pitié que tu m’inspires ne soit surpassée par mon irritation. »
Le résultat fut immédiat, et ils se remirent en chemin. Au moins certaines méthodes restaient-elles fonctionnelles. Eloignant de gestes répétés de la main les quelques badauds qui n’avaient pas la présence d’esprit de s’écarter immédiatement de son passage, il se remit à progresser à bon rythme. L’homme devait les mener à une taverne, dans laquelle il avait apparemment rendez-vous avec sa protectrice. De là, les choses progresseraient simplement. Il poussa la porte de l’établissement miteux, tentant de ne pas manifester de manière audible le dégoût que lui inspirait son atmosphère. Au moins l’extérieur était-il aéré. Puis, il gagna une table, accompagné de son nouveau camarade. Il doutait que la supercherie dure longtemps. Il n’en avait de toute façon pas besoin. Une fois que la patronne du gamin serait identifiée, fuir ou lutter ou se rendre ne changerait rien à l’issue finale de leur confrontation.
Dernière édition par Hypanatoi Konostinos le Jeu 28 Mar - 5:27, édité 1 fois
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Dim 24 Mar - 6:40