Caliban Berkalia est né de l’union d’une aventurière reconnue, Gloria Berkalia, et d’un honnête garde, Alban Tibérius. Leur union n’aurait sans doutes pas existée si l'aventurière de haut rang n’avais pas dut sacrifier son bras gauche à un Scorleo ayant attaqué le campement où elle et trois autres camarades se reposaient loin au nord. Gloria montait la garde ce soir-là, elle n’aperçut néanmoins le monstre que trop tard alors qu’il bondissait vers elle. Se jetant sur le côté au tout dernier moment, la griffe qui aurait dut lui trancher la gorge sectionna à la place son bras gauche un peu plus haut que le coude. Son cri de douleur alerta ses compagnons qui réussirent à faire fuir la créature. Bien que sa vie soit sauve, elle dut se rendre à l'évidence : sa blessure signait la fin de sa carrière d'aventurière. Pourquoi pas dès lors accepter enfin les avances que lui faisait Alban depuis plusieurs mois. Elle l’avait rencontré pour la première fois dans une taverne, et quand bien même l’homme n’avait pas la même ambition qu’elle il lui avait semblé être honnête et attentionné.

Gloria fit sa reconversion comme enseignante après quelques années, avec pour matière de prédilection la Faune locale. Cela ne l'empêcha pas de garder de bons contacts avec la guilde des aventuriers, ne manquant jamais l'occasion de se rendre au bureau principal pour donner des conseils à tout membre désireux d’écouter ses histoires. Cependant celui à qui elle racontait le plus ses histoires n’était autre que son fils, Caliban.

Elle avait beau ne plus posséder qu’un seul bras, cela ne l’empêcha pas d’enseigner à celui-ci le maniement de l’épée dès son plus jeune âge. Alban ne voyait quant à lui pas d’un bon œil que son enfant ait une arme entre les mains avant même d’avoir eu sa première amourette mais il du bien reconnaitre qu’au vu des dangers de ce monde, une formation au combat ne serait jamais un mauvais investissement.
C’est donc sans surprises que le jeune Caliban voulut rejoindre la guilde des aventuriers dès ses seize ans. Cependant son père insista pour qu’il suive d’abord au moins une année de cours de spécialisation magique.

Gloria réussit grâce à ses contacts à la Guilde à lui trouver un professeur ayant déjà travaillé avec un élève au pouvoir similaire ; bien que celui-ci ait été l’enfant de deux nobles et qu’il fut fort dissipé, ne voyant son pouvoir autrement que comme un moyen d’impressionner les filles. Caliban réussit en quelques mois de durs labeur à comprendre mieux sa capacité, il réalisa ainsi qu’elle lui serait fort utile en combat et décida de prendre quelques saisons de cours supplémentaires auprès d’un ancien compagnon d’aventures de sa mère. L’homme s’était rangé une dizaine d’années après Gloria, alors qu’il passa proche de la mort une fois de trop à son goût. Il avait presque réussi à atteindre l'un des plus haut rangs et n’avait que peu perdu de sa superbe malgré son âge avancé. Caliban, bien que capable d’user d’un pouvoir permettant de se repositionner pour garder l’avantage ou esquiver des coups, n’arriva malgré tout à toucher son adversaire qu'après de longs mois. Mois pendant lesquels il reçut d'ailleurs des coups qui en avaient fait fuir plus d'un…

Alors qu’il fêtait ses dix-neuf ans, ses deux professeurs lui informèrent qu’il avait enfin le niveau requis pour survivre de par lui-même hors des murs de la capitale. Il s’engagea le soir même.
Ses premières missions furent comme pour bon nombre d'aventuriers, somme toute peu intéressantes. Il réussit néanmoins à se faire un nom parmi les autres recrues grâce à son style de combat agile mais puissant. Certains s’amusant à l’appeler « la terreur des Sangloutons » là au d’autres novices s’essayaient à le défier en duel entre deux missions. Malheureusement pour lui, là où force brute et une utilisation limitée de son pouvoir suffisait à occire des bêtes féroces mais peu dangereuses, contre des humains capables d’élaborer des plans et possédant eux aussi parfois des pouvoirs forts utiles, c’était une autre paire de manches…

Les duels amicaux entre jeunes aventuriers prirent place dans une arène improvisée proche du deuxième relais entre Althéa et Lycoris. Ces petites démonstrations de talents prirent cependant fin quand une patrouille de gardes tomba sur l’un des duels auxquels les recrues prenaient part et décréta que ceux-ci mettaient trop en jeu l’intégrité physique des jeunes hommes et femmes. Leur informant que des sanctions seraient prises à leur encontre s’ils continuaient à se battre entre eux en dehors d’une arène officielle. Certains d’entre eux, fils et filles de nobles ou personnes d’influence, ne voulant pas que leur famille soit au courant de leurs petits affrontements, les duels cessèrent. Seul Julius, la vingtaine et maniant une impressionnante épée à deux mains, continua de lui adresser occasionnellement des défis organisés officiellement à l’arène des Graciés. La rivalité des deux hommes se transforma peu à peu en profonde amitié et Caliban ne manquait que rarement une occasion de partir à l’aventure avec lui.

Une autre de ses rencontres mémorables fut celle avec Arya Vaelys, une petite commerçante. Il l'a sortie, par le plus grand des hasards, d'une situation épineuse il y a quelques années et les deux jeunes gens ont gardé contact depuis. Arya lui proposait de temps en temps de petits travaux, ce qui permettait à Caliban de se garder informés sur les actualités de la capitale et de ne pas dépendre uniquement de sa mère pour ses contacts. Leur relation, au début purement "commerciale" finit par se changer en amitié au fil des années.

Finalement sa dernière rencontre non négligeable fut celle d’une boulangère de quatre an son ainée. Celle-ci, prénommée Luculla, avait hérité de la boulangerie de ses parents après un tragique accident ayant entrainé la mort de ceux-ci. La garde informa l’orpheline qu’ils avaient été les malheureuses victimes collatérales d’un règlement de compte entre deux bandes locales. Une enquête fut lancée mais très vite clôturée après l’arrestation de deux criminels présumés leaders de leur bande respective. Les Berkalia quant à eux étaient des clients réguliers de la boulangerie et contrairement à une majorité des autres clients qui n’appréciaient pas les nouvelles créations de Luculla et arrêtèrent de fréquenter l’établissement, restèrent fidèles à leurs habitudes.

Caliban reconnaissait la force de volonté de cette femme qui ne s’était laissée abattre ni part la mort de ses géniteurs ni par l’abandon d’une frange non négligeable de ses clients, il décida d’essayer à son niveau de lui apporter de l’aide, faisant passer le mot auprès de ses collègues sentinelles : une boulangère pleine de passion et de talent peinait à trouver clientèle. Alban fit de même auprès de quelques gardes avec qui il était resté en bon termes après sa retraite, là où Gloria réussit même à lui dégoter un contrat avec l’école ou elle enseignait. Luculla fit le lien entre les nouveaux clients et la famille Berkalia et semblait fort gênée à chaque passage de Caliban. Voyant qu’elle se dédiait corps et âme à son commerce, il en déduisit que redonner sa gloire d’antan à la boulangerie était peut-être sa manière de faire son deuil et d’honorer ses aïeux. Il tenta bien de l’inviter quelques fois à venir boire un verre mais elle refusa systématiquement lui disant qu’elle n’avait malheureusement pas le temps pour ça, se devant de préparer les produits qui seraient vendus le lendemain.

Le bon moment pour lui vint alors qu’allait être organisé un banquet pour célébrer les cinq ans de l’installation des portails magiques. Fabrice Berkalia, son grand père qu’il n’avait jamais pu connaitre, ayant participé au premier contact avec Lycoris, la famille Berkalia était de temps en temps invitée à prendre parts à certaines célébrations historiques. Habituellement, c’était Gloria qui se chargeait d’assister à de tels événements. Cependant celle-ci n’avait plus autant d’entrain à passer toute une soirée entourée de nobles prétentieux et de fonctionnaires insipides et décida d’envoyer Caliban représenter la famille. Elle l’informa qu’il pouvait emmener une personne avec lui, ne manquant pas de préciser qu’il y avait souvent un bal organisé avant le repas et qu’il était préférable de ne pas s’y soustraire. Voyant la mine déconfite de son fils, elle rajouta qu’il était généralement suffisant d’exécuter la dance d’ouverture sans pour autant s’attarder dans le cadran qui lui serait assigné. Caliban n’ayant jamais dansé de sa vie, et la réception étant sensée se tenir dans un mois, cette dernière se présenta comme un mur infranchissable pour le jeune homme.

Le lendemain matin alors qu’il passait prendre sa commande habituelle auprès de Luculla, celle-ci ne put s’empêcher de remarquer qu’il semblait troublé et lui demanda quel était le genre de problèmes qui pouvait miner le moral d’un grand gaillard comme lui. Elle ne put s’empêcher de sourire alors qu’il racontait comment sa mère l’avait désigné pour la remplacer à une soirée mondaine, allant même jusqu’à laisser s’échapper un tout petit rire quand il mentionna qu’il ne savait pas danser. Caliban interrompit son récit en remarquant la gaieté nouvelle de la boulangère. Elle sembla le fixer un instant et réfléchir, se rappelant qu’elle n’avait jamais pu remercier correctement la famille Berkalia pour tout ce qu’ils avaient faits pour l’aider à maintenir son commerce. Elle lui déclara finalement, d’une voix enjouée bien que légèrement tremblotante : « Et bien c’est ton jour de chance, ma mère m’a appris les rudiments du ballet. Cependant je n’ai jamais pu mettre à pratique les heures passées à répéter les mouvements qu’elle a tenté de m’enseigner… Que dirais-tu que je te montre demain soir ? Si tu es un aussi bon élève que ce que Gloria m’a dit tu ne devrais pas avoir de trop de mal à me suivre. » Caliban fut fort surpris par le changement d’attitude de Luculla et mit quelques longues secondes avant de réagir et d’accepter sa proposition.

Le lendemain au soir, comme convenu, il retrouva celle-ci à sa boutique alors qu’elle fermait la devanture. Elle expliqua que son petit cours serait donné chez elle car le salon de la maison de ses parents était suffisamment grand. Une fois arrivé chez elle, il fit la rencontre de Rémy, barde ami de longue date de feu la mère de Luculla. Celle-ci profita d’ailleurs qu’ils étaient occupés à faire connaissance pour s’absenter, allant enfiler une tenue plus adaptée aux circonstances. Il ne lui fallut pas plus d’une dizaine de minutes pour revenir vêtue d’une robe et de souliers qui semblaient encore neufs. Caliban fut frappé par la prestance qu’elle dégageait dans cette tenue, ne l’ayant jamais vue porter autre chose que des vêtements de travail amples et peu féminins. Elle lui apprit que c’était une tenue ayant appartenue à sa mère, qui aurait eu tant aimé pouvoir la porter lors d’une réception mais qui n’avait jamais eu la chance d’être invitée autrement que pour faire le service des amuse-bouche.

Caliban se saisit de l’occasion pour révéler à sa professeure qu’il était autorisé à emmener quelqu’un avec lui et qu’il serait honoré de pouvoir lui permettre de réaliser le rêve de sa mère si elle le désirait. Elle eut du mal à cacher une larme versée devant l’apparente candeur de son élève d’un soir. Elle reprit cependant rapidement ses esprits et commença, sur les notes jouées par Rémy, une rapide démonstration des quelques mouvements qu’elle maitrisait le mieux. Vint ensuite le moment où il dut s’essayer à reproduire les pas élégants de la demoiselle. Bien que cela ne fut pas un total échec, elle comprit qu’il lui faudrait probablement plusieurs autres séances avant de réussir à au moins faire bonne figure au milieu d’habitués. Il fut donc convenu que chacune des soirées ou les trois pourraient se rendre disponibles, serait allouée à des leçons supplémentaires.

Vint ensuite le grand soir. Pour l’occasion Caliban avait été préalablement s’acheter quelques vêtements plus classieux et avait offert à Luculla une belle broche à cheveux sertie de quelques petites mais néanmoins remarquables pierres semi-précieuses. Ce cadeau était selon l’aventurier censé récompenser la talent et le temps investi par la demoiselle. Elle fut un peu gênée devant une telle pièce mais il insista que pour un tel événement il était tout à fait normal de se présenter avec au moins un bel accessoire, le but de ce genre de soirée étant après tout de se démarquer. Luculla accepta donc le cadeau, et remarqua même que la partie centrale de la broche ressemblait vaguement à un pain tressé. Elle se demanda si Caliban l’avait fait exprès, ou si c'était le pur fruit du hasard.

Une fois arrivés au lieu où se tenait le banquet ils furent tout deux frappés par l'excès de décorations. Ils gardèrent au mieux leur contenance face aux autres invités jusqu’à l’ouverture du bal. Cela ne passa étrangement pas loin d’un sans-fautes pour Caliban et Luculla qui bénéficièrent grandement du choix de musique fait par les organisateurs : en effet le thème joué pour l’ouverture n’était nulle autre qu’un réarrangement d’un des thèmes favoris de la mère de Luculla ; thème dont Rémy s'était abondement servi lors des cours particuliers. Ils enchainèrent les mouvements, se faisant au passage remarqués par quelques nobles peinant à suivre la cadence qu’ils imposaient malgré eux aux malheureux se trouvant dans le même cadran. Forts de leur petit succès local, Caliban voulut tenter un mouvement plus compliqué. Cependant à son plus grand étonnement le tempo de l’orchestre augmenta alors qu’il tentait d’initier un saut de basque.

Luculla ne comprit pas l’intention de son partenaire et continua sa chorégraphie, ajustant simplement sa vitesse au nouveau tempo joué. Il se rendit alors compte en plein saut que sa trajectoire le ferait atterrir en plein devant sa partenaire qui risquait fort de devoir s’arrêter net pour l’éviter si elle ne voulait risquer leur chute commune. S’imaginant d’avance les rires de la noblesse devant leur future ridicule, Caliban se risqua à activer sa magie en plein air. Il se retrouva en une fraction de secondes derrière Luculla, et dans un but de faire comme si cela avait été prévu, se saisit de la jeune femme avant de la projeter en l’air. Il réactiva son pouvoir une seconde fois pour venir presque instantanément se placer là où elle allait atterrir et la rattrapa d’un bras tout en prenant une pose triomphante.

Une partie des autres danseurs s’était arrêtés quelques secondes plus tôt alors qu’il s’élançait dans les airs, une autre, bien plus nombreuse s’arrêta alors que Luculla était projetée dans les airs. Un micro silence s’était installé dans leur cadran, ainsi que dans les cadrans limitrophes. Il fut cependant rapidement brisé par un tonnerre d’applaudissements devant la prise de risque payante du duo. Ce moment mêlant gloire et léger malaise fut heureusement rapidement brisé par l’arrêt de la musique et l’annonce d’un changement de thème. La plupart des autres danseurs s’éparpillèrent alors, ne restant que les artistes professionnels du cadran central ainsi qu’une minorité de nobles voulant eux aussi leur petit instant de gloire sous les yeux de leurs compatriotes. Caliban profita de ce répit pour retenir son envie de vomir et reprendre son souffle, il avait presque oublié qu’il n’était pas recommandé d’utiliser un talent comme le sien plusieurs fois à la suite. Ils furent ensuite invités par son ancien professeur de magie à prendre place à l’une des tables, le sexagénaire ayant reconnu le jeune homme après qu’il eut exécuté son mouvement spectaculaire. Il reçut même des éloges de sa part pour ne pas s’être effondré au sol malgré la double utilisation de son don. Le reste de la soirée se passa sans événements remarquables.

Alors qu’il raccompagnait Luculla chez elle, il lui demanda si elle voudrait encore à l’avenir participer à d’autres sorties avec lui. Elle lui répondit par l’affirmative. Le lendemain il ne put s’attarder à la boulangerie car Julius l’avait appelé en renfort pour une expédition. Quatre jours plus tard, à son retour, il fit immédiatement un crochet par chez Luculla et lui fit une proposition qui marqua l’évolution de leur amitié en romance. Elle lui proposa finalement d’emménager chez elle quelques mois après ce fameux ballet qu’ils n’oublieraient jamais.

Presque deux ans jour pour jour après avoir pris ses quartiers avec Luculla, la sentinelle s’essaya à l’examen pour monter au Rang supérieur. Lequel fut réussi de justesse par trois des dix prétendants au rang, dont Caliban. Pour célébrer leurs succès les trois promus décidèrent, bien que ne se connaissant que très peu, de passer leur prochaine expédition ensemble. Ils se rendirent au bureau principal de la guilde le lendemain matin de bonne heure et embarquèrent pour une nouvelle aventure. L’avenir nous apprit cependant que ce fut là une bien mauvaise décision, leur groupe manquais de diversité : tous trois étaient des épéistes relativement confiants dans leurs talents respectifs, néanmoins aucun n’avait développé pléthore de compétences utilitaires. Le soin de la lecture de carte fut donc confié au plus ancien des trois qui s’était autoproclamé leader de leur groupe temporaire. Bien mal leur en fit, l’homme, un certain David Jyscal, leur fit bifurquer trop tard de la route principale et les mena tout droit sur le territoire de chasse de Cœurls. Le petit groupe de spadassins monta son bivouac à l’orée d’une forêt que leur carte renseignait comme peu dangereuse. Cependant aucun d’entre eux ne s’était rendu compte de l’erreur d’orientation de David, ils n’auraient sinon jamais décidé de camper là-bas.

Cette nuit-là Caliban fut sorti de son sommeil par le hurlement de douleur d’un de ses compagnons. Il enfila à la hâte son gambison et se saisit de son épée alors que David peinait à s’équiper de son lourd plastron. Dehors celui qui montait la garde était aux prises avec deux Cœurl des bois, il saignait abondement au niveau des bras et jambes et avait de plus en plus de mal à tenir debout. Il s’effondra au sol juste après que Caliban eut porté un coup d’estoc qui força l’une des bêtes à bondir en arrière. Il semblait mal en point et crachait du sang. L’autre créature se mit à tourner autour de cette nouvelle proie alors que David sortait enfin de la tente. Caliban n’avait cependant pas de temps à accorder à ses compagnons, de nuit il n’avait clairement pas l’avantage. Il réussit tant bien que mal à tenir en respect, et même blesser, le Cœurl qui finit par prendre la fuite, rapidement suivi par le second qui n’avait visiblement pas trouvé d’angle d’attaque le satisfaisant. Là encore, si l’un des aventuriers s’était rendus compte qu’ils n’étaient pas là où ils pensaient être, ils auraient pu prendre une meilleure décision.

Ils procédèrent donc comme suit : David s'occuperait du blessé sur place pendant que Caliban montait la garde, en attendant le matin où ils iraient se réfugier à un relais. Evidemment cela ne se passa pas comme ils l'espéraient : une dizaine de minutes plus tard des bruits stridents se firent entendre dans la forêt, suivis d’un silence lugubre. Caliban aperçut ce qui devait être une demi-douzaine, voire plus, de silhouettes se déplaçant entre les arbres. Quatre d’entre elles bondirent vers lui et ses compagnons. Il réussit à placer sa lame d’un geste qui para l’attaque de la première créature avant de devoir utiliser son pouvoir pour esquiver la seconde. Les deux derniers se jetèrent sur David. Tous deux furent rapidement débordés alors que trois autres Cœurls se mettaient à tourner autour du campement. Était-ce donc comme ça qu’ils allaient périr ? David agitait son épée dans tous les sens, dans l’espoir que les bêtes prendraient à nouveau la fuite.

Caliban réfléchissait, il avait bien une idée, mais celle-ci impliquait d’abandonner ses camarades, et il n’arrivait à se résoudre à faire ce choix. Alors qu’il s’économisait au mieux, ne faisant qu’esquiver les attaques sans en rendre aucune, il vit que David avait mis un genou à terre et que les trois bêtes faisant des cercles autour de leur campement s’étaient arrêtées et regardaient toutes trois vers lui, ainsi que le corps inerte de la sentinelle épuisée qu’il tentait de protéger. Caliban comprit que les créatures allaient probablement se jeter dans quelques secondes vers ses compagnons et dut se résigner à choisir entre mourir en héros, en rejoignant ce qui allait devenir un bain de sang, ou profiter de ce qui serait à coup sûr sa seule opportunité de s’enfuir. Il attendit le dernier instant, alors que ses deux adversaires bondissaient en cœur vers lui, pour activer son pouvoir et se retrouver à quelques mètres de là. Il le réactiva deux fois de plus avant de foncer en ligne droite vers ce qu’il se souvenait être la route principale, espérant mettre suffisamment de distance entre lui et les créatures…

Il reprit conscience deux semaines plus tard, à Althéa, dans un endroit qui lui semblait vaguement familier. Était-ce donc là le fameux endroit après la mort dont parlaient ces vieux textes religieux dont raffolaient son père ? Son questionnement fut interrompu par un visage familier qui passa la porte, celui d’une femme qui pleura tout se ruant vers lui, ayant remarqué son réveil. Le nom de cette femme lui revint, Luculla, il balbutia quelques mots alors qu’elle s’efforçait de reprendre son calme habituel : « Tu es resté entre la vie et la mort pendant des jours après que deux gardes t’aient ramené, je commençais à perdre l’espoir que tu reviennes parmi nous… » Elle lui expliqua ensuite le rapport que la guilde lui avait transmis quelques jours après qu’il fut retrouvé inconscient sur la route par une patrouille. A la mention du fait qu’il était le seul survivant du trio une partie de ses souvenirs revinrent le frapper, ainsi qu’une vague de honte de n’avoir rien pu faire pour sauver ses camarades. Se targuant de la qualité nutritive de ses créations, Luculla lui apporta une quantité faramineuse de pâtisseries pendant les deux jours suivant où il dut rester alité.

Il reçut aussi la visite de ses parents pendant sa récupération, ainsi que d’Arya, qu’il n’avait plus revue depuis un certain temps déjà. La commerçante lui apporta un petit cadeau pour célébrer sa survie face à une horde de Cœurls, sur le paquet était aussi laissé une petite carte avec un mot :
"Rétablis toi vite, j'ai encore beaucoup de petits services à te demander, ne me force pas à te remplacer ! Soigne-toi bien,
    -Arya Vaelis"

Vint ensuite le moment de quitter le confort de sa chambre, rien que marcher lui faisait grincer des dents après tant de jours sans activités physiques. Alors qu’il s’apprêtait à mettre un pied hors de sa demeure, il entendit comme un cri, cela fit instantanément ressorti le souvenir du cri l’ayant réveillé cette fatidique nuit. Il décida de rester à l’intérieur encore une journée, activant un à un ses muscles endoloris. Le lendemain, il se réessaya à sortir, cette fois accompagné de Luculla qui avait fermé boutique plus tôt pour l’occasion. Leur balade fut laborieuse, Caliban semblant hésiter à chaque intersection. Alors qu’ils s’apprêtaient à faire demi-tour ils tombèrent sur Julius qui revenait d’une expédition fructueuse et invita son camarade de longue date à venir boire un verre dans leur établissement habituel. Caliban accepta à contrecœur ne voulant pas vexer son vieil ami.

Lors de la soirée, entre deux verres d’alcool, il dut s’absenter une dizaine de minutes alors que ses souvenirs devenaient trop douloureux. Deux jeunes hommes, aussi motivés que lui, qui avaient probablement aussi une famille, qu’ils ne reverraient jamais… Lorsqu’il revient à la table Julius était en train de raconter son dernier exploit, son ami à qui tout souriait, comme à lui-même jusqu’il y a peu, n’avait pas encore eu à faire face à l’échec ni à la mort. Il espérait au fond de lui que la chance de Julius ne tournerait jamais, mais décida de prendre congé de l’homme, n’arrivant plus à retenir ses noires pensées. Julius ne se rendit pas réellement compte de la profonde détresse de son camarade et mit son départ sur le coup d’un abus trop rapide d’alcool après une période d’alitement.

De retour à leur logement, Luculla tenta de le réconforter au mieux, lui rappelant tous les bienfaits apportés par les aventuriers au grand dam de leur propre personne. Il refusa malgré tout de sortir pendant quelques jours, prétextant une forte douleur musculaire au niveau des jambes. Sa compagne n’était pas dupe mais n’insista cependant pas, se disant qu’il avait peut-être juste besoin d’un peu de temps pour surmonter son traumatisme. Cependant après une semaine où il n’allait pas beaucoup plus loin que les limites de leur quartier, elle requerra l’aide de Gloria, qui avait aussi eu à vivre des expéditions ou tout ne s’était pas passé comme prévu, pour remotiver son fils. Caliban écouta sa mère mais n’accepta pas pour autant de sortir par-delà les murailles de la ville, estimant qu’il avait eu trop confiance en ses capacités et avait manqué de prudence et de remise en question.

Passèrent encore deux ou trois semaines lors desquelles il se contenta de trainer un peu à l’auberge et d’errer en ville. Il avait bien tenté d’aider Luculla à tenir son commerce, mais il n’était pas très doué aux fourneaux. Elle se rendit vite compte qu’il n’était pas à l’aise du tout avec ce genre de travail, n’ayant pas la fibre commerciale ni artistique, ses créations étaient insipides. Elle tenta même de lui faire tenir le comptoir, cependant les retours des clients furent mitigés : certes il ne se trompait pas dans la distribution des marchandises ni le calcul des prix mais il leur semblait parler à une coquille vide plutôt qu’à un être humain.

La saison du pollen était déjà bien entamée quand Luculla commença un peu à durcir le ton envers lui : « Ecoute Cal, tu ne peux pas continuer à essayer de vivre une vie d’artisan, je vois bien que l’aventure te manque… Peut-être pourrais-tu essayer de repartir sur des petites missions simples ? Imagine que tu débutes, réapprends les bases si besoin. Je crois en toi, sinon tu ne serais pas ici, mais je veux revoir ton sourire radiant, celui que tu affichais avant de partir en expédition. Cal, il faut que tu y retournes, si tu préfères te morfondre encore des semaines voire des saisons entières alors retourne vivre avec Gloria et Alban, mais tu sais aussi bien que moi que ta mère te fera le même sermon ! » Cette tirade eut son effet, l’aventurier réalisa en effet que son attitude changeante affectait aussi ses proches, bien que reluctant il accepta de retourner au bureau de la guilde sous quelques jours.

C’est ainsi, alors que la saison du pollen était déjà bien entamée, que la rumeur commença à se propager. Un aventurier expérimenté, seul survivant de son groupe s’était enfin remis sur pied. Cependant ses collègues ne comprirent pas pourquoi le vétéran refusait catégoriquement de participer à des expéditions d’un rang autre que celui de Novice. Il insista pour leur dire qu’il n’était pas aussi fort que ça, qu’il avait peut-être réussit l’examen du rang supérieur par chance, qu’il avait encore beaucoup de choses à apprendre s’il espérait un jour rejoindre voire dépasser le rang atteint par sa génitrice. Quelques-uns se mirent à se moquer de sa perte de volonté, d’autres, comme Julius, furent plus compatissants.
Le soir de retour chez lui, il remarqua immédiatement que Luculla était fière qu’il ait enfin fait un pas vers son retour à la vie active. En guise de célébration elle avait invité ses parents pour un petit repas. Alban salua le choix de son fils de continuer tout en prenant moins de risques, là ou Gloria fut plus expressive et lui assura que dans quelques mois il serait à nouveau en train d’écrire l’histoire.  

Cependant il ne s’attendais pas à ce son histoire continue dans un autre monde. En plein milieu de la nuit, une vive lueur réveilla Caliban et Luculla, ils n’eurent à peine le temps de se regarder qu’ils disparurent sans un bruit.
Quand Caliban rouvrit les yeux il était en face de plusieurs personnes qui lui expliquèrent rapidement les tenants et aboutissants de son "invocation" alors qu'il les regardait fixement sans rien dire. Une fois leur tirade finie il ne pensa qu'à une seule chose : "Mais où est Luculla ?"
L'on lui signifia qu'il y avait du y avoir un décalage de temporalité, utilisant des mots qu'il ne comprenais que peu, mais qu'il ne devais pas trop s'inquiéter, que cela ne prendrais que quelques heures ou jours avant qu'elle n'arrive elle aussi saine et sauve dans leur nouvelle "demeure".
Était-on entrain de le rassurer, ou plutôt de lui mentir pour s'assurer de sa pleine coopération…
Sur les injonctions d'un homme autoritaire, il fut conduit vers les quartiers de l'église de l'ordre, où il reçut de nouveaux vêtements et une arme.
En attendant d'en savoir plus, et de retrouver Luculla, Caliban accepta à contrecœur de rejoindre une unité de "croisés" devant protéger Portalia, un lieu dont il ne savait rien mais qui allais devenir sa nouvelle maison bon gré mal gré.

Caliban travaille pour l'église par défaut, cependant il ne leur fait pas entièrement confiance au vu des explications lacunaires qu'ils lui ont donné. Malgré ses doutes, il n'hésitera pas à mettre sa vie en danger pour aider les autres innocents comme lui dans une guerre qui les dépassent.

Si un moyen de retourner dans son monde d'origine se présente, Caliban sera certainement tenté par la proposition, mais n'espérez pas le manipuler à commettre des exactions dans ce but car il est très loin d'être du genre à sacrifier autrui pour atteindre ses objectifs.

Caliban pourrait être amené à changer d'allégeance une fois qu'il en saura plus sur ce monde, ou s'il venais à arriver quelque chose à sa précieuse Lculla…

Adorateur d’Hiroyuki Sawano, Fonctionnaire du Royaume de Belgique, Fan de Dragons, Hérault du Rouge et Collectionneur de Waifus.

Ma devise (au travail ?) : Faites-moi confiance, votre récompense vous l'aurez quand viendra ce beau jour. Quand la gloire couronnera ma tête !