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Marguerite du Psychagité
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Aujourd’hui, je suis au bout de ma vie. Si je meurs dans la journée, je ne serai pas surpris. Je ne sais pas si je regrette de connaître une fin si jeune, ou si je l’attends avec impatience.

Pour vous donner le contexte, imaginez un peu la scène : moi, dehors à midi tapantes, adossé aux murs de la Cathédrale. Le soleil est haut dans le ciel, il n’y a presque pas d’ombre. Qu’est-ce que je fais là, me demanderiez vous, et vous auriez raison d’être curieux ? Après tout, ce n’est pas du tout dans mes habitudes, ni même dans mes passe-temps rêvés. Eh bien, il faut savoir qu’après mes derniers déboires avec ma marguerite, j’ai décidé de concéder à quelques… sacrifices. Je n’avais pas le choix : ill fallait que je sorte, au moins une fois par jour, tous les jours, pour que ma fleur reçoive son  taux d’ensoleillement réglementaire quotidien. Selon mes informations, il lui fallait entre 6 et 8 heures d’ensoleillement par jour, plutôt en début ou en fin de journée. Mais 6 ou 8 heures, c’est beaucoup trop pour l’Archiviste du Collège des Interdits. J’avais donc décidé de faire un compromis : si je la sortais 3 heures sur le temps du midi, quand l’ensoleillement était le plus fort, ça devrait revenir au même, non ?

J’étais donc posé là, faisant de mon mieux pour ne pas regretter mon choix. Chaque fibre de mon corps hurlait au soleil, me disant de retourner m’abriter aux sous-sols, là où il fait sombre et où il n’y a personne, mais je résistais. La santé de ma fleur était plus importante que mon bien-être personnel. Je ne comprenais pas pourquoi elle et moi, on avait des attentes aussi différentes.

Par chance, il ne faisait pas très chaud, mais le soleil était à son zénith et inondait toute la ville d’une lumière blanche et aveuglante. Il n’y avait presque pas d’ombre, à cette heure-ci, c’est pourquoi je restais collé à la Cathédrale, profitant du minuscule trait d’ombre qui l’entourait. Si je n’avais pas moi-même vu, et senti, les effets du soleil sur ma plante la veille, je n’y croirais pas. J’avais toujours du mal à accepter que cette torture puisse lui être bénéfique, à elle ou à moi, mais je devais y croire. Elle avait déjà meilleure mine, et j’espérai que jamais plus je ne me réveillerai un jour à la voir toute flétrie dans son pot à nouveau.

Mon problème, c’était qu’il n’y avait pas que la lumière à gérer. Il y avait le bruit de la ville, aussi. On était proche de midi, en plein centre-ville, au carrefour de la Cathédrale de l’Ordre et de la Tour de la Guilde. Alors que le soleil baignait tout d’un blanc aveuglant, les rues étaient quant à elles noires de monde ; ça courait dans tous les sens, ça posait des questions, ça criait, ça formait des groupes, ça se battait… Midi était la pire heure de la journée. Même quand je vivais encore dehors, j’évitais à tout prix de sortir à cette heure-là. Je ne voulais pas être là.

Des gens m’approchèrent. Ils me demandèrent si j’allais bien, qu’ils me regardaient depuis un moment, debout là sans bouger contre les murs de la cathédrale, avec ma fleur, le regard perdu. Est-ce que j’attendais quelqu’un, est-ce que j’avais besoin d’aide, est-ce que j’étais un nouvel invoqué, ce genre de trucs. Ça n'arrêtait pas.

Je ne trouvais pas l'énergie de leur répondre. Je gardais le regard fixé par terre. Ils me donnaient mal à la tête, et ils continuaient encore. Alors sans leur daigner ni un regard, ni un mot, je me mis à marcher droit devant moi, coupant à travers la foule. Je ne savais pas où j’allais. Partout où j’irai, le soleil taperait pareil, mais peut-être que si au moins je m’éloignais du centre-ville, il y aurait moins de monde, moins de bruit, et que ça serait plus confortable.

Alors je marchais, toujours tout droit, passant devant les auberges, les boutiques, les magasins, les comptoirs. À travers la foule, dans la lumière, rasant les murs pour un peu d’ombre. Il n’y en avait pas, à part sous les étals des marchands, ceux là qui vous appellent très fort et vous attrapent si vous vous approchez trop près. Ceux qui m'avaient adressé la parole me suivaient encore. Ils me demandaient pourquoi je ne leur répondais pas. Ils se moquaient un peu, aussi. Ils avaient remarqué que je n'avais pas d'essence, ils me demandaient si j’étais un nouvel invoqué. Je n'avais toujours pas envie de leur répondre. Ca aurait probablement été plus simple de le faire, mais je n’arrivais pas à convaincre mes lèvres de le faire, donc je continuais de les ignorer, avançant droit devant. Je me disais qu’ils finiraient bien par abandonner.

Je n’avais aucune idée d’où j’étais. Je n’étais jamais venu dans ce quartier. Ça sentait de plus en plus fort dans les rues : la plupart des bipèdes mangeaient à cette heure-ci. Toute la ville était pleine de senteurs d’épices, de viande, de pain… J’avais mal au cœur. Y’avait des effluves sucrées aussi, qui me montaient à la tête. Je mis une main sur mon nez, pour bloquer les effluves. Je n'aurais pas dû sortir. Je n'avais pas d'autre choix que de sortir.

Quelqu'un me bouscula. Contrairement à l'autre jour, quand Ryza m’avait pris la main, je n'aimais pas ce contact-là, venu de nul part, sans gentillesse et sans douceur. Sans même me voir. Je m'immobilisai un moment le temps de grimacer, fermant les yeux, réprimant un frisson.

Je voulais rentrer.

Je me retournai. Il me semblait avoir marché droit devant moi, et pourtant la rue derrière moi ne menait pas tout droit sur la Cathédrale, mais sur une autre rue qui la coupait perpendiculairement. Je n’avais aucune idée de par où rentrer. Les types qui me suivaient depuis tout à l’heure avaient disparu. Je ne savais pas depuis quand ils étaient partis. Je ne savais pas depuis combien de temps je marchais. Je ne savais pas si c’était assez de temps pour ma fleur.

Je restai là, immobile, au beau milieu de la voie. Je ne savais pas si je devais continuer, reculer, rester là. Je n’arrivais pas à penser. La lumière me faisait mal aux yeux. Il y avait plusieurs personnes en train de cuisiner, certaines chez elles la fenêtre ouverte, d’autres dans des tavernes, auberges et bars qui menaient sur la rue, j’entendais la ferraille racler les casseroles et les poêles, l’eau versée dans les verres, les verres et la vaisselle s’entrechoquer, les effluves me montaient à nouveau au nez malgré ma main devant. Je réprimai un haut le cœur, quelque chose me remonta dans la gorge. Je ne voulais plus être là.

Il y avait quelqu’un à côté de moi à nouveau. Encore une fois, on me demandait pourquoi je restais planté là, si ça allait, pourquoi je tremblais, pourquoi je pleurais. Je serrais ma marguerite plus fort contre moi. La personne continuait à poser les mêmes questions. Les gens continuaient de manger. Le soleil continuait de briller. Ça ne s’arrêtait pas. Je devais rester dehors pour ma fleur, mais le monde n’arrêtait pas de tourner. Une main me saisit le poignet.

Je repoussai violemment la personne en arrière, assez pour la faire tituber. Je criais, peut-être, je ne sais plus. Et puis je fuis. Vers la porte la plus proche, pour sortir du dehors, y laisser le soleil, les bruits, la nourriture, les gens. L’endroit était petit, c’était tant mieux. Je cherchai immédiatement un coin où me planquer. Il y avait des tissus partout, pliés, sur des cintres, il y avait des cartons aussi. Je me jetai sous un portant contre le mur duquel pendaient plusieurs tissus épais en rang volumineux, assez me couper du monde. Il y avait un carton  juste à côté avec des tissus encore plus grand, encore plus épais. J’en attrapai une grosse poignée, et je m’emmitouflai dedans en tremblant. Je laissais le carton posé là comme un mur. Plus de lumière, plus d’odeur. Et beaucoup moins de bruit. J’arrivai à respirer à nouveau.


Dernière édition par Marguerite du Psychagité le Dim 17 Déc - 14:16, édité 1 fois
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Ashandra Bah'ruul
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Le soleil était à son zénith, irradiant les rues de Portalia de ses rayons méridionaux. Si la capitale était en effervescence à cette heure fatidique de la journée, Ashandra elle, était affairée dans l’ombre  solitaire de son atelier. Le beau temps lui filait le cafard. Il y avait quelque chose d’accablant dans la manière dont les humains s’agitaient joyeusement sous les premiers rayons de la journée tel un rituel occulte. Comme si une simple baignade de lumière pouvait avoir raison de tous les maux du monde… Un tel miracle n’existait pas, la démone le savait. Et pourtant, elle avait encore du mal à admettre qu’elle ne supportait pas les élans de leur joie manifeste ni même leur façon idiote d’exulter au contact des uns et des autres. Car quoi de pire que de contempler le bonheur des autres ?

Pourtant, le moment était mal choisi pour se morfondre et retomber dans ses travers car désormais, la démone avait une image de marque à respecter. Ce n’était pas en tirant une gueule de six pieds de long que les clients allaient affluer. Aller Ash, haut les cœurs… Il fallait voir le bon côté des choses : au moins, personne n’était venue l’emmerder en plein milieu de son inventaire. Les arrivages de tissu avaient pris du retard sur les dernières semaines. Rien d’anormal quand on considérait la logistique hasardeuse qui dépendait bien malheureusement du bon vouloir des gardes et des aléas monstrueux aux abords de la ville. Si elle n’avait pas fait les yeux doux aux livreurs, elle aurait probablement perdu sa matinée à ranger et trier tous les cartons, au lieu de pouvoir s’atteler aux patrons de la nouvelle collection. Ce qu’il ne fallait pas faire parfois, pour être bien traitée par les hommes... Rien de tel que de leur faire croire qu’ils étaient indispensables. Ash en connaissait un rayon sur le domaine, ayant même toute une panoplie de théories à ce sujet.

La plupart des cartons étaient maintenant rangés sous les étals de manière logique, de façon à différencier plus facilement les matières et les teintes selon leurs numéros de bain. L’agencement n’était pas des plus esthétiques mais faisait largement l’affaire. Après tout, personne ne viendrait d’ici là lorgner de près sous ses portants. Ashandra ne croyait pourtant pas si bien dire. Alors qu’elle crayonnait quelques marquages sur ses patrons, une tornade fit son irruption dans la pièce. Sans crier gare, une silhouette s’était réfugiée à l’intérieur de la boutique avant de se jeter littéralement sous un étal de robes et tabards. Étonnée par la rapidité et l’improbabilité de cette confrontation, la démone n’eut le temps que de lever les yeux avant d’en faire tomber sa cigarette.

« Et merde... » pesta t-elle de bon cœur en ramassant le tube calciné qui était tombé sur le tapis.

Déjà qu’elle payait déjà une petite fortune en cristaux désodorisants pour ne pas que l’odeur du tabac imprègne les vêtements, voilà qu’elle ruinait maintenant le mobilier à cause de ses fâcheuses manies. La démone gratta un instant la surface noircie des fibres de son ongle long, en espérant dissimuler son méfait. Ces quelques secondes de rattrapage peu fructueux ne suffirent pas à faire recouvrir ses esprits à l’inconnu, visiblement mal en point. Sans le brusquer, Ashandra abandonna son ouvrage pour se lever et observer la scène. La créature, de forme humanoïde, était prostrée dans un coin comme un animal blessé. Son premier instinct la conduisit à jeter un œil à l’extérieur, en scrutant les alentours de la boutique. En ouvrant la porte, l’air chaud et estival s’infiltra dans la boutique, la faisant fatalement plisser les yeux. Après plusieurs coups d’œil suspicieux, la démone ne vit rien d’anormal, en dehors des quelques badauds qui détournaient le regard sous la vigilance de ses prunelles d’argent. L’homme n’était donc pas poursuivit, voilà qui était rassurant. Qu’est-ce qui avait bien pu le mettre dans cet état de panique ?

La démone considéra un instant la silhouette tremblante d’un air désolé. Une approche frontale serait sans doute malvenue dans ces circonstances. Elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver de la compassion pour la détresse évidente de l’inconnu tout en s’amusant secrètement de sa maladresse. Ashandra n’aurait pas été étonnée de trouver un enfant au milieu de ses vêtements, au lieu de quoi, du peu qu’elle en avait vu, la silhouette à ses côtés augurait un adulte en pleine santé. C’est à partir de ce constat enfantin que la démone choisit son angle d’attaque, feignant de ne pas avoir remarqué la présence pataude du jeune homme. Allant à l’opposé de l’homme timoré, la démone se dirigea d’un air faussement songeur vers le rayon des pardessus et manteaux.

« Alors… Qu’est-ce qu’on a là ? » dit-elle avant d’écarter les cintres des vestes du plat de ses deux mains pour donner l’illusion qu’elle cherchait quelque chose. « Un chiot égaré? Non. » invalida t-elle directement avant de changer de direction.

Elle jeta ensuite son dévolu sur les pantalons et les jupons, tout en poursuivant son petit jeu puéril.

« Un chaton peut-être.. ? » demanda t-elle cette fois-ci en faisant mine d’être déçue de ne rien trouver derrière le nouvel étal de vêtements. « Non plus. »

De par son drôle de manège, la démone essayait de faire gagner du temps à l’inconnu, dans l’espoir qu’il s’apaise et puisse anticiper une conversation. Mais il fallait dire qu’elle avait à faire à une véritable tête de bois. Là où d’autres seraient déjà sortis de leur cachette, l’individu se faisait désirer. Les talons de ses bottines claquèrent ostensiblement sur le parquais, afin de signaler sa présence géographique. A quelques pas de la scène du drame, la démone s’immobilisa un instant pour se pencher légèrement sur le côté.

« Oh, une fleur déjà. » dit-elle en jetant un œil au pot de fleur qui accompagnait le jeune homme. « Mais je doute qu’elle soit venue de son plein gré. Il n’y a pas pire que moi pour ce qui est de la main verte… » lâcha t-elle avec dérision.

Quand elle y réfléchissait, elle n’était déjà pas foutue entretenir une relation. Il n’y avait donc rien d’étonnant à ce qu’elle fasse mourir toutes les plantes qui passaient entre ses mains. A croire qu’elle n’était douée que pour créer des choses inertes, tels que ses vêtements et que le monde la mettait en garde quant à sa gestion des êtres vivants.

Enfin, la démone fit un pas de plus pour s’accroupir à une distance courte mais raisonnable de son drôle de client. Ash se fendit d’un sourire en voyant ses petites jambes flageoler sous une couche de tissu écru chiffonné, celui-là même qu’elle avait placé ce matin durant son inventaire.

« Il y a quand même plus confortable que le lin, tu sais. Surtout pour l’usage que tu en fais. Mais c’est un très bon choix par ces fortes chaleurs. » railla t-elle de sa voix douce et rendue grave par un excès de nicotine.

Sans faire le moindre geste brusque, la démone projeta de rester ainsi, tranquillement à ses côtés en attendant qu’il vienne à elle.

« Et si tu sortais de ta cachette ? Il fait bon à l’intérieur, même le soleil a mieux à faire que de rentrer ici. »

Ashandra n’était pas la dernière à se moquer de tout, et surtout de ses propres déboires. Il faut dire que pour l’instant la boutique n’attirait pas grand monde, à cause de sa jeunesse et de la drôle de réputation qui pesait sur sa démone de tenancière. Au moins, l’espace avait le mérite d’être assez calme et intimiste pour servir convenablement les quelques clients qui osaient pénétrer dans cette antre. L’endroit n’était peut-être pas idéal pour le moment, mais il l’était pour une personne actuellement, alors Ash pouvait s’en accommoder.



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Dans mon repli stratégique, j'en avais oublié une loi fondamentale de la société : les bâtiments appartenaient toujours à quelqu'un. Il y avait donc très souvent des gens à l'intérieur. À peine je commençais à retrouver mes esprits que je remarquai des brassements d’air dans l'espace, une respiration, des bruits de pas. Je n’étais pas seul.

Je n’avais toujours aucune envie de sortir ; même si j’arrivais de nouveau à réfléchir, c’était encore trop tôt. Si je sortais, il y allait avoir le bruit, la lumière, les gens encore. On me poserait des questions auxquelles je n’avais pas envie de répondre, on m'attraperait sans me prévenir, et on se moquerait de ma réaction, et puis on me demanderait encore pourquoi je réagissais comme ça, comme si je le contrôlais. J’espérais qu’elle ne me remarque pas. Je partirai tôt ou tard (je préférais mille fois mes Archives à cet endroit que je ne connaissais pas), mais pas tout de suite. J’avais encore besoin de temps.

Par chance, elle ne se dirigea pas vers moi tout de suite. Je ne savais pas s’il elle m’avait vu, j’espérai que non. Je ne savais pas à quel point j’étais visible ou non, car je ne voulais pas encore relever la tête et ouvrir les yeux : j’avais peur de ce que je verrais, peur de la lumière et des couleurs; peur de croiser un regard. Et puis, tant que je gardais les yeux fermés, j'arrivais à me convaincre que j’étais bien caché. Je ne voulais pas briser l'illusion.

Je sursautai quand elle se mit à parler et ne pus m’empêcher de retenir ma respiration. Elle savait que j'étais là. Elle me cherchait. Mes jours étaient comptés, elle allait finir par me trouver.

Au fond, je n’étais pas certain de savoir ce qui me faisait peur à ce point, donc je me mis à chercher des raisons valables pour me justifier. Peut-être qu’elle allait se mettre en colère de me voir là, chez elle, dans cette drôle de maison pleine de rideaux. Peut-être allait-elle me demander de m’excuser auprès de cette personne que j’avais poussé, tout à l’heure. En tout cas, elle me jetterai sans doute dans le dehors à nouveau, et ça, ça me faisait très peur.

Alors je restais là, à me faire tout petit. Je considérai un instant l'idée de me détransformer : il serait plus facile de me cacher, de trouver un endroit inatteignable. Mais je ne pouvais pas : je ne pourrais pas emporter ma fleur avec moi sous ma vraie forme, je serais obligé de la laisser là. Et je ne pouvais pas me le permettre, je devais donc à tout prix rester sous cette forme-là, quoi qu'il en coûte.

C'est pile à ce moment-là que la voix résonna, tout près de moi cette fois.

« Oh, une fleur déjà. »

Oubliant toute prudence, je me précipitai pour me saisir du pot que j'avais négligemment laissé sur le sol, pour le prendre sur moi. C'était certain, maintenant, elle m'avait vu. Je grimaçai, mais bon, vu les mots qui suivirent sur sa relation aux plantes, je pense que c’était quand même mieux que je la garde contre moi.

Je pris ensuite une profonde inspiration pour me préparer mentalement à ce qui allait suivre. Qu’elle me demande ce que je faisais là, m’ordonne de sortir, me menace d'appeler quelqu’un, peut-être que j’avais abîmé quelque chose en entrant, je ne sais plus.

Mais à ma grande surprise, ce ne fut pas le cas. Je la sentis bouger, mais elle n’ouvrit pas les rideaux, elle ne déplaça pas le carton non plus. Malheureusement, elle ne s’éloigna pas non plus. Elle… s’était assise ? Je ne comprenais pas. C’était probablement un piège, mais je ne comprenais pas comment il fonctionnait, je ne savais pas comment y échapper. Alors j’attendis un instant sans bouger.

« Il y a quand même plus confortable que le lin, tu sais. Surtout pour l’usage que tu en fais. Mais c’est un très bon choix par ces fortes chaleurs. » dit-elle finalement.

Je ne comprenais toujours pas. Était-ce un indice ? Elle avait mis quelque chose dans le lin ? L’avait ensorcelé ? Ou bien essayait-elle de me le faire croire pour me faire sortir ? Je reniflai le tissu pour être sûr. Je ne sentais rien. Par contre, je me sentais un peu mieux. Je restais méfiant, mais pendant tout ce temps, elle ne m’avait pas tiré de ma cachette. Je ne savais pas trop pourquoi, mais en tout cas j’appréciais ça. J’avais les yeux ouverts maintenant, et la pièce était sombre, pas autant que dans mes archives, mais plus sombre que dehors. Je n’entendais personne d’autre qu’elle, dans la pièce, le reste du paysage sonore c’était les cris du dehors qui devenaient murmure à l’intérieur. Les tissus étaient lourds, comme une protection, et je sentais le poids familier de mon pot de fleur entre mes mains. Je remarquai que je ne tremblais plus.

Et puis finalement, parce que je bougeai pas non plus, elle reprit :

« Et si tu sortais de ta cachette ? Il fait bon à l’intérieur, même le soleil a mieux à faire que de rentrer ici. »

Finalement, je commençai à m’étirer, mais ce n’était pas pour me lever et “sortir de ma cachette”. Je me repositionnai plutôt un peu mieux, m’asseyant par terre au lieu de me tenir accroupi, parce que je commençais à avoir mal aux jambes dans cette position.

- Je préfère rester. Je répondis simplement d’une voix un peu cassée.

J’avais la gorge irritée. J’avais certainement dû crier, tout à l’heure, même si je ne m’en souvenais déjà plus. J’avais le tour des yeux qui me grattait, aussi. Et j’étais encore à bout d’énergie. Ici c’était tait bien, sombre et calme, j’aimais le petit espace, avec les rideaux bizarres au dessus de moi. Maintenant que j’y pense, ça ne ressemblait pas à des rideaux. J’en attrapai un, je tirai un peu. Il me tomba dessus.

- On est où, là? Je demandais alors que j’examinai encore le tissu dans mes mains.
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Ashandra Bah'ruul
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Alors que le beau temps laissait présager des bonnes affaires, n’importe qui pouvait constater à contrario le vide qui régnait dans la boutique tamisée de la démone. Une raison de plus pour laisser son humeur maussade gagner du terrain. La solitude lui était insupportable, tout comme son introspection qui cherchait à rationaliser de manière émotive l’absence de clients pendant la période estivale. Peut-être l’évitaient-ils ? Et si elle leur donnait raison en se montrant odieuse, en exposant les facettes les plus épouvantables de sa nature ? Au moins, on parlerait d’elle, l’abominable créature démoniaque qui tenait une office de tailleur, au lieu d’aller au front comme tous ses prédécesseurs. Ash voyait déjà les grands titres se profiler, et aussi l’expression de honte profonde qu’une telle réalité inspirerait aux Bah’ruul si ces faits parvenaient à leurs oreilles. Il n’y avait pas que le devoir du prestige qui coulait dans ses veines, les tares du clan étaient aussi un héritage de famille.

Aujourd’hui, les choses étaient pourtant différentes. Ashandra devait mieux faire, ne pas rester dans l’ombre de ses émois. Elle ne pouvait pas maudire tout Portalia, ni songer à l’anticipation de son échec. Ici, personne n’était pas là pour entendre ce pitoyable récit, il n’y avait aucun modèle à atteindre et personne à décevoir, si ce n’était elle-même. Si au moins une âme osait pénétrer dans les lieux, la démone aurait le cœur plus léger et cesserait de broyer du noir inutilement. Même un oiseau ou un rat, ça lui irait. Un signe que les êtres vivants ne l’avaient pas complètement abandonné. Au lieu de quoi, ce fut un individu en chair et en os, qui débarqua dans sa boutique comme un criminel qui cherchait à fuir ses assaillants à toute enjambée. Peu importe, il avait entendu son appel, elle pouvait donc bien se contenter d’un larron.

Son petit jeu avec l’inconnu avait un double bénéfice. Elle le laissait respirer d’une part, et il lui faisait oublier son désespoir d’autre part. Ash avançait à un rythme lent pour laisser l’opportunité à son drôle de client de se révéler de lui-même. Quand l’inconnu mordit une première fois à l’hameçon en se jetant sur son pot de fleur, visiblement précieux pour lui, un sourire espiègle et triomphant se dessina sur les lèvres de la démone. L’espace d’un instant, elle put le darder de ses yeux d’acier, comme pour vérifier son âme. Ce n’était qu’un homme ou du moins, une créature humanoïde équivalente de prime abord. Savoir qu’une personne ordinaire avait franchi le perron de la boutique la soulageait d’un poids invisible, même si son client tremblait encore présentement comme une feuille frissonnant à l’hiver. On avait la clientèle qu’on méritait, Ash.

Quand son invité renifla plus franchement la grande étoffe de lin toute froissée par ses soins, la démone ne put retenir un rire, qui prenait des tonalités de ricanement avec l’âpreté de sa voix. Pensait-il que le tissu cachait quelque secret mal intentionnés ? Ses yeux s’étaient suffisamment habitués à cette demi-pénombre pour que les mouvements de son presque interlocuteur lui soient clairement visibles. Elle ne voulait pas l’humilier davantage en faisant une blague mal sentie sur sa méfiance paranoïaque tout en assumant la réputation de sorcière qui pesait sur ses épaules mais Ash ne connaissait pas la sensibilité de ce dernier. Mieux valait s’abstenir jusqu’à ce qu’il se tranquillise au moins un peu.

Lorsque Ashandra lui proposa enfin de sortir de sa cachette, elle cru qu’il allait d’abord s’exécuter avant de constater qu’il changeait simplement de position. Avec le tissu qui lui avait servi de capuche temporaire, ses cheveux étaient ébouriffés, lui donnant des allures de poussin sorti du nid. Sa petite voix mal assurée et la robe qu’il tira maladroitement pour se faire une nouvelle couche protectrice lui arrachèrent un nouveau sourire un peu attendri. Ashandra avait toujours un faible pour les créatures en détresse. Elle ne se fâcha nullement de sa décision de rester dans son nid douillet.

« D’accord. » dit-elle simplement en haussant légèrement les épaules.

Qu’est-ce qu’on pouvait faire contre la volonté des hommes ? Pas grand-chose. Ils étaient butés et irrationnels, quand ils n’étaient tout simplement pas despotiques. Ashandra ne les connaissaient que trop bien. Son sourire s’étira plus franchement d’une façon sibylline quand il lui demanda où ils se trouvaient. Bien sûr, elle avait manqué à ses obligations commerciales.

« Chez un tailleur, dans ma boutique pour être exacte. » répondit-elle sur le ton de la confidence comme si les murs pouvaient les entendre.

Elle se releva alors souplement en campant de manière assurée sur ses hauts talons pour retrouver une posture plus marchande.

« Bienvenue au Brûle-Pourpoint ~ Là où votre imagination est la seule limite possible. » scanda t-elle avec un regain d’optimisme.

Sans chercher à le pousser au vice, du moins, pas pour le moment, la démone reprit sa course en se dirigeant vers le comptoir. Elle était enjouée. Voilà longtemps qu’elle n’avait pas eu à prendre soin de quelqu’un d’autre.

« Je peux proposer du thé noir, un café noir… Oui, il y a un thème commun. » poursuivit-elle pour couper toute tentative prématurée de raillerie.

C’est que ses papilles gustatives de démone étaient difficiles à stimuler. Si la nourriture ou les boissons n’étaient pas trop salées, sucrées, épicées, amères ou acides, elle ne sentait rien du tout. Et une vie sans plaisirs ne méritait de toute façon pas d’être vécue.

« Ou de l’eau. Mais c’est tout de même moins sexy. » dit-elle de manière facétieuse en se disant que c’était déjà un bon début, après toute cette agitation.

Entre la chaleur et une crise de panique évidente, son petit protégé avait surtout besoin de se désaltérer. Sans attendre de réponse favorable, Ash lui amena un grand verre d’eau qu’elle posa à environ un mètre de lui pour ne pas initier un contact dont il ne voulait probablement pas. Reculant ensuite de quelques pas, la démone retourna à son comptoir, une main soutenant sa tête au niveau du menton pour scruter son invité. Elle avait l’impression d’apprivoiser un petit animal en l’appâtant avec des vivres. La situation avait de quoi faire sourire.



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Heureusement, la dame ne semblait pas pressée de me jeter dehors. Elle ne se mit pas non plus en colère et, vu comme mes oreilles bourdonnaient encore un peu du chahut à l’extérieur, je lui en étais fortement reconnaissant. J’avais réussi à gagner un peu de répit. Et j’y avais eu si peu droit en ce moment, que j’étais bien déterminé à en profiter au maximum.

Je pris donc quelques secondes, une minute peut-être, pour analyser la situation un peu plus en détail. Déjà, je respirais un peu mieux. L’air ne sentait que les tissus et un peu de poussière; les effluves des cuisines qui s’enflammaient au dehors ne m’atteignaient pas ici. En parlant de tissu, celui que j’avais choppé ne paraissait pas ensorcelé ou empoisonné non plus, je confirmai, le sentant une nouvelle fois. En me concentrant un peu plus, je réalisai que toutes les fabriques avaient la même odeur autour de moi. Tout sentait très propre, plus que dans un banal débarras ou un vestiaire. Trop propre, peut-être ? Ça ne sentait pas le corps, le vivant et le dégoûtant, comme dans la plupart des vestiaires, et ça ne sentait pas le savon comme dans les laveries non plus.

Bon, j’admets qu’en entrant, je n’avais pas vraiment eu la tête à analyser les lieux, mais maintenant que je prenais le temps, la réponse à ma propre question devenait très claire, juste au moment où la dame l’annonçait à voix haute.

« Bienvenue au Brûle-Pourpoint ~ Là où votre imagination est la seule limite possible. »

On était donc chez un tailleur. Et le tailleur, ou devrais-je dire la tailleuse en question, c’était donc elle. Je me surpris à me détendre encore un peu davantage; c’était loin d’être le pire endroit où atterrir par erreur, en ville. Certes, j’admets que je ne suis pas généralement un grand fan du shopping : je n’ai jamais eu d’argent pour acheter quoique ce soit, et même maintenant, je ne suis pas sûr que mon salaire d’Archiviste ne me permette de faire beaucoup de folies. De plus, je n’ai pas besoin de nouveaux vêtements, j’ai déjà assez d’une tenue. Je ne transpire pas comme les humains, et je ne me roule pas dans la boue, non plus. Donc je n’ai besoin de rien.

(Et puis de toute façon, j’économise déjà pour un nouveau classeur, un grand qui ferme sur la tranche avec au moins 8 intercalaires cartonnés de couleurs différentes et des pochettes plastifiées pour pouvoir conserver les plus beaux papiers et encre de mes collections, bien à l’abri du temps. Bref, le rêve de toute une vie.)

Cela dit, comme je le disais plus haut, ça ne me dérangeait pas de rester là non plus, je pensai alors qu’elle se levait pour un autre coin de la pièce. Les tissus absorbent les bruits, c’est un peu comme les documents des archives. Perdus dans les objets, on oublie vite le grouillement des gens au dehors, tout est calme. J’aime mieux les gens qui préfèrent s’entourer d’objets plutôt que de gens, on parle de choses plutôt que de personnes.

Je fais tomber un autre tissu de sa tringle au-dessus de moi, cette fois-ci exprès, pendant qu’elle a le dos tourné, puis un deuxième, et un troisième. J’aime juste bien être sous les tissus, ça calme. Je ne sursautai même pas quand elle éleva la voix à nouveau, de plus loin dans la pièce.

« Je peux proposer du thé noir, un café noir… Oui, il y a un thème commun. Ou de l’eau. Mais c’est tout de même moins sexy. »

Une boisson ? Sur le coup, je n’en voyais pas vraiment l’intérêt, mais alors que je m’apprêtais à le dire, ma gorge me rappela douloureusement qu’elle était toujours douloureusement irritée. Elle n'avait peut-être pas tord, boire un coup me ferait sans doute du bien.

La mention du thé et du café, et noirs en plus, me fit grimacer. Ces grains et ces plantes étaient beaucoup trop forts pour moi. Imbuvables. Je ne voyais vraiment pas l’intérêt que les gens avaient de se faire souffrir avec ça. Et puis, mettre du sucre dedans n’était… probablement pas une très bonne idée, après les récents évènements lors de ma rencontre avec Ryza. Je lui aurai bien dit que je préférais de l’eau, mais malheureusement, je m’en montrais incapable, à cause de l’état de ma gorge, justement. Pour arriver à l’atteindre de sous les couches de vêtements, il faudrait que je hausse la voix, et je n’aimais déjà pas ça en temps normal. Alors avec une gorge douloureuse comme ça… Quitte à ne pas pouvoir lui répondre, j’espérais plutôt qu’elle abandonne le sujet, mais là voilà que j’entendais verser quelque chose de liquide. Qu’avait-elle donc choisi !? Sûrement pas de l’eau, vu qu’elle venait dire que ce n’était pas “sexy” ou un truc du genre.

(Je ne saurais même pas par où expliquer pour parler de mon ressenti sur ce mot, donc je ne relèverai pas).

Je m’enfonçais à nouveau sous les couvertures, alors que je l’entendais se rapprocher et déposer quelque chose près de moi. Pendant ce temps, je paniquais à nouveau : pourquoi j’avais pas pris sur moi, pour lui dire que je préférais de l’eau ? Elle m’avait sans doute servi du café ou du thé, et j’allais devoir refuser, et elle allait sûrement se vexer. Alors que je cherchais comment me sortir de cette situation, je l’entendais reculer à nouveau.

Bon, au moins elle n’étais pas juste à côté, même si elle se mettait en colère, ce n’était pas aussi horrible que ça. Je jetai un œil furtif sur ce qu’elle avait déposé et fut surpris de constater que c’était… de l’eau. Tout du moins ça en avait l’air. Trop surpris, je l’attrapais immédiatement pour vérifier et, vous l’aurez deviné, je le reniflai. J’y trempai même les lèvres. C’était bien de l’eau, celle du système de canalisations de Portal, légèrement plus riche en calcaire que celles du centre-ville, mais sans l’arrière goût un peu douteux typique de celui-ci. Avant de m’en rendre compte, j’avais déjà tout englouti. J’avais plus soif que je ne le pensais.

Bizarrement, je me sentais bien. Mieux qu’à l’arrivée en tout cas. C’était les tissus autour de moi, ou la tranquillité des lieux, ou le manque d’odeur forte, ou le fait que cette personne savait garder ses distances, ou l’eau. Ça ne valait pas les archives ou la cathédrale, mais c’était quand même assez haut placé sur ma liste.

Je me dis que peut-être, il était temps de tendre une main métaphorique à la maîtresse des lieux pour avoir été aussi courtoise. C’est donc tout naturellement, après un rapide état des lieux pour trouver un sujet de conversation adéquat, que je lui balançais :

- Y’a personne dans votre boutique. J'en ai jamais vu une aussi vide, on dirait même pas que c’en est une.

C’est un bon compliment, ça, non ? Moi, moins j’ai de visiteurs aux archives et mieux je me porte, j’imagine que ça doit être pareil pour elle, non ? Et je la vouvoie même, ce que je ne fais pas souvent (je n’en vois pas souvent l’intérêt, mais là, j’ai envie de faire une bonne seconde impression) ! Et puis avec un peu de chance, elle pourra peut-être m'expliquer comment elle fait pour repousser les gens.
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"Par couches successives"






&
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En bonne créature de la nuit qui se respectait, Ash s’acclimatait de la pénombre de sa boutique, sans prendre ombrage de la surprise de son interlocuteur. Peut-être que l’obscurité était trop omniprésente pour la plupart des êtres diurnes qui arpentaient les rues ? Ainsi, le Brûle-Pourpoint manquait sans doute de visibilité, empêchant les passants de s’arrêter devant sa devanture. Ne serait-ce donc pas finalement la raison de la rare fréquentation des lieux ? Non, voilà qu’elle leur trouvait encore des excuses, plutôt que d’admettre que les clients évitaient tout bonnement son commerce lugubre. La démone projetait d’abreuver l’égaré du jour qui, d’après des bruits de tissus glissants qu’elle ne connaissait que trop bien, continuait de se débattre avec les vêtements cintrés. En optant pour de l’eau, faute de réponse assertive, Ashandra ne put finalement s’empêcher de le taquiner, en le voyant sortir de ses couches de tissu aussi maladroitement qu’un oisillon sortirait de sa coquille.

« Un oiseau tombé du nid. C’est donc ça. » dit-elle tandis que ses yeux se plissèrent de manière railleuse.

Bien qu’il soit d’apparence humanoïde, son petit protégé ressemblait davantage à un volatile égaré, cherchant à recréer un nid douillet et rassurant. Le voir vider son verre d’une traite lui laissait entendre que la petite créature était manifestement assoiffée. Le regard de la démone, qui luisait d’un éclat argenté, trahissait son amusement et sa curiosité à l’égard de ce drôle de personnage. Malgré son anxiété apparente, l’inconnu ne semblait pas la craindre plus que de raison. A croire que ni sa réputation, ni l’extravagance de son look ne l’intimidaient. A moins qu’il n’ait fui bien pire en se réfugiant dans sa boutique ? Cette désagréable perspective affûta davantage ses prunelles qui se rétrécirent sous l’effet de ses traits préoccupés. Ashandra était rouillée depuis qu’elle avait aspiré à une retraite tranquille à Portalia mais une Bah’Ruul n’oubliait jamais ses instincts belliqueux quand la situation l’exigeait. S’il fallait en découdre, elle serait encore capable de distribuer des leçons impitoyables, d’autres vermines en avaient souillé leur pantalon bien avant ces nouveaux détracteurs.

Mais voilà, aucune menace ne s’était pour l’instant profilée à l’horizon. Inutile d’effrayer celui qui lui offrait un peu de compagnie et qui éveillait ses instincts léonins de protectrice. La psy’ avait pourtant été claire à ce sujet. Il fallait arrêter d’envisager systématiquement le pire, parait-il, et toujours chercher le positif dans le négatif. Quelle logique merdique, on voyait bien qu’elles n’étaient pas nées dans le même monde et qu’une telle philosophie l’aurait vite usée au milieu de ses congénères. Mais on ne pouvait pas demander à une humaine de comprendre les subtilités des us démoniaques, tout comme une démone ne pouvait envisager d’assimiler un jour tous les rouages complexes de la psyché humaine. Ce n’était pourtant pas faute d’essayer.

La remarque soudaine de son interlocuteur en était la parfaite illustration. Sincèrement surprise par le décalage entre l’attitude bilieuse de l’inconnu et le réalisme brutal de ses paroles, Ashandra se fendit d’un rire nerveux mais authentique. Voilà une chose à laquelle elle ne s’était pas attendue. Un tel culot conjugué à une bonne dose d’innocence donnait un mélange détonant. Qu’est-ce qui avait bien pu le pousser à mettre les deux pieds dans le plat de cette façon ? Oui, la boutique était déserte, comme si Ash pouvait l’ignorer, toute contrariée qu’elle était encore quelques minutes avant son arrivée. Mais ses paroles sonnaient comme un constat positif, ce qui l’empêcha de justesse de rétorquer avec sa susceptibilité habituelle. L’homme en face d’elle n’était pas à appréhender de façon ordinaire, avec ses drôles de lubies et son effroi qui le suivait partout comme s’il avait le diable aux trousses.

« Je suis la première au courant. » reconnut-elle de manière amère mais indulgente. « Je ne suis pas installée depuis longtemps. Et puis, au moins c’est cosy, non ? » se sentit-elle obligée d’ajouter pour se justifier.

Elle était de toute façon bien trop fière pour lui demander des suggestions, puisqu’il semblait si informé que ça, à ce quoi devait ressembler une boutique digne de ce nom. La remarque innocente avait suffit à raviver les cendres de son pessimisme. De façon machinale et instinctive, sa main alla chercher nerveusement de quoi apaiser la tension passagère. De l’étui noir et rectangulaire, Ash sortit sa précieuse dose de nicotine qu’elle ne tarda pas à embraser à l’aide d’un paquet d’allumettes qui traînait sur le comptoir. Les premières bouffées, qui ne lui piquaient même plus la trachée, firent leur chemin salvateur jusqu’à ses poumons avant d’être expirées en volutes de fumée. On n’était pas passé loin d’un énième saute d’humeur mais Ashandra avait sauvé la situation in extremis, en partie grâce à ses bonnes vielles habitudes. Tant pis, elle n’était plus à un cristal désodorisant près.

« J’imagine que c’est une chose positive pour toi. » lâcha t-elle en retrouvant rapidement sa lucidité et son calme de départ grâce à l’action de la nicotine.

Et dire qu’Ash avait cru, l’espace d’un instant, qu’il se payait sa tête. Mais la démone avait bien vite réalisé qu’il n’en était rien, avec ses airs paumés et la grande révérence avec laquelle il s’était adressé à elle. Son interlocuteur était présentement inoffensif, c’est elle qui avait tendance à prendre la mouche trop facilement. Un long soupir, mêlé à un nouveau rejet de tabac consumé, s’échappa de sa bouche qui s’incurva finalement en sourire apaisé. Maintenant qu’elle s’était fait une raison, elle trouvait cette timidité presque adorable. Il la vouvoyait comme un enfant balbutiant devant l’autorité alors qu’elle ne s’était pas gênée pour le traiter avec familiarité. Ne se considérait-il pas comme un adulte à son tour ?

« Tu peux me tutoyer, tu sais ? » ajouta t-elle en tapotant la cendre de son mégot dans un cendrier prévu à cet effet. « C’est pas comme si tu étais vraiment un client. A moins que ça soit ta façon unique et avant-gardiste de porter des vêtements ? » dit-elle, moqueuse, en désignant la drôle de façon dont il s’enroulait dans ses tenues comme s’il s’agissait de simples châles.

Une centaine d’autres questions lui traversait l’esprit face à cet étrange énergumène mais une seule s’imposait dans l’instant présent.

« Tout va bien maintenant ? Tu étais en danger à l’extérieur ? » demanda t-elle en retrouvant un ton plus enveloppant, presque maternel.



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Dernière édition par Ashandra Bah'ruul le Dim 20 Aoû - 17:20, édité 1 fois
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La dame mentionna un oiseau tombé du nid. Je n’avais certes pas fait très attention, mais je n’avais pas vu d’oiseau en entrant. Même là, en furetant autour de moi, je n’en voyais pas ; et puis, les oiseaux tombés de leurs nids, ça piaille non ? On devrait l’entendre. Sauf s’il est mort, bien sûr, mais je ne voyais ni d’oiseau vivant, ni d’oiseau mort. Soit il était quelque part dans mon angle mort (et je ne voulais pas sortir de là où j’étais pour regarder), soit elle parlait à voix haute de quelque chose dans sa tête. Ça pouvait m’arriver de dire tout haut des trucs dans ma tête, aussi décidai-je finalement, malgré ma curiosité, de ne pas le relever. Des fois, on se dit des choses à toi sans attendre de réponse, et je préférai donc complimenter sa boutique, pour qu’elle sache que moi, j’étais pas du genre à me moquer des gens qui parlent tout haut de ce qu’il y a dans leur tête.

Je n’étais pas sûr qu’elle ait saisi la nature de ma remarque, parce qu’elle répondit :

« J’imagine que c’est une chose positive pour toi. »

Le choix de ses mots me laissait quelque peu perplexe, du coup je m’empressai de justifier mon compliment :

- Bien sûr. Quand il n’y a personne, il n’y a pas besoin de faire semblant d’être normal, je répondais en haussant les épaules comme s’il s’agissait d’une évidence. Pas besoin de faire semblant de comprendre, de répondre ce qu’il faut, de regarder pile le temps qu’il faut dans les yeux, de ne pas avoir de mouvements bizarres, ou même de -je frissonnai- de sourire.

Non, les sourires ça n’apportait rien de bon, que ce soit les miens (si on pouvait appeler ces grimaces-là des ‘sourires’), ou ceux des autres. Je n’avais pas besoin de montrer les dents pour montrer que j’aimais bien quelque chose, moi. C'est le monde qui est bizarre. Et d’ailleurs, quand on se sent bien, on ne devrait pas avoir à se forcer de faire quoique ce soit qu’on a pas envie de faire juste pour le montrer.

- Et puis les gens, ça vous approche, ça vous demande de faire des trucs, ça s’énerve si vous réagissez pas comme ils l’attendent, si vous êtes trop lent ou trop rapide, ça se met à parler fort pour ne rien dire, ou à vous toucher l'épaule ou le poignet sans raison, et ça se moque de vous quand ça voit ce que vous aimez et ce que vous n’aimez pas et que c’est pas comme eux.

La tirade était longue, c’était là sans doute plus de mots que je n’avais prononcé depuis plusieurs jours (le verre d’eau aidait), et j’aurais pu continuer encore longtemps : j’avais bien malgré moi assez d’expérience avec les gens pour savoir que quoi que je fasse, ça ne leur plairait pas. Je m’étais résolu à l’idée que, visiblement, tout le monde avait appris les règles du jeu bidon de la Connexion Sociale et que, par plaisanterie cruelle, on refusait de me donner le manuel. En comparaison, quand il n’y avait personne, on pouvait faire ce qu’on voulait, comme on voulait, et ne pas avoir à se soucier des muscles de son visage, des mouvements qu’on faisait ou du ton de sa voix, on pouvait même faire tomber ou abîmer des trucs, c’était pas grave parce que personne n’était là pour le voir.

Être seul, c’était être libre.

« Tu peux me tutoyer, tu sais ? »

A peine redescendu de la fierté de ma tirade, je rougis d’embarras et m’enfonçai plus profondément dans les tissus. J'avais pourtant essayé d’être poli, m’étais-je encore trompé ? Je ne comprenais pas comment j’étais supposé savoir s’il fallait vouvoyer ou tutoyer quelqu’un, on disait que vouvoyer c’était plus poli, mais à chaque fois que j’essayais, on me répondait plutôt de tutoyer. C’était à n’y rien comprendre.

En tout cas, elle avait remarqué mon petit manège, avec ses vêtements.

« C’est pas comme si tu étais vraiment un client. A moins que ça soit ta façon unique et avant-gardiste de porter des vêtements ? »

Je rougissais de plus belle. Ah, oui. C’était les vêtements qu’elle vendait. Je paniquai un instant, réalisant que je devrais peut-être les remettre à leur place.  Et puis, une petite voix me dit que je voulais les garder. Que c’était encore trop tôt pour sortir et affronter le dehors. Alors que fis quelque chose de très utile, qui marche toujours (au moins au début) : j’ignorai le problème pour l’instant. Oui, j’étais encore un peu embarrassé, mais ce serait pire si je sortais de là, donc mieux valait attendre sagement que la température de mes joues redescende gentiment.

« Tout va bien maintenant ? Tu étais en danger à l’extérieur ? »

... Et mes joues reprirent quelques degrés de plus. Ah, oui. Le dehors. Ce qui m’avait poussé ici. Comment pouvais-je expliquer ce qui s’était passé ? Devrais-je mentir, trouver un autre prétexte ? Je n’étais pas doué du tout pour mentir… Il valait mieux dire la vérité. J’étais en sécurité de toute façon, sous les tissus, du moins j’avais l’impression. Je marmonnais donc, le plus bas possible :

- Dehors il y a trop de soleil. Ça tape et ça fait tout blanc, ça fait mal aux yeux. Trop de bruit, aussi. On entend tout le monde en même temps et on s’entend même plus penser. Et en plus, y’a quelqu’un qui m’est rentré dedans. Ou peut-être que c’est moi qui lui suis rentré dedans. Je sais plus.

De nouveau, j’avais du mal à respirer, je crois que je m'étais remis à trembler un peu. J’avais presque l’intention d’être là, de retour au milieu de cette rue, complètement perdu.

- Je voyais plus rien. J’arrivais plus à penser. Y’avait quelqu’un je crois et je… Je sais pas. J’ai crié, peut-être. Je l’ai poussé, je crois. Fallait que je parte, alors j’ai couru et puis je me suis retrouvé… ici.
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Il y avait quelque chose d’étonnant dans cette rencontre. La démone et l’oisillon formaient un drôle de duo antithétique. Ash était communicative, audacieuse et cafardeuse, là où son petit protégé se révélait timoré, angoissé et plein de vie. Elle souriait maintenant d’un air attendri en voyant le jeune homme chercher de manière presque caricaturale l’oiseau tombé du nid en question. Comment une créature aussi innocente et pure avait-elle pu survivre en ville jusqu’ici ? Ashandra en était certaine, ce jeune homme avait besoin d’aide. Et quoi de mieux qu’une personne vulnérable qu’il fallait prendre sous son aile pour oublier le vide de son existence ?

Après une maladresse malheureuse, qui la fit douter un instant de ses bonnes intentions, la démone était parvenue à se faire une raison. Son drôle de client n’était pas bien méchant mais gauche et malhabile. Que serait-il advenu de lui s’il était plutôt tombé sur une personne colérique et opportuniste ? La démone en frissonna d’appréhension. Ce monde n’était pas fait pour lui, et il avait besoin d’alliés pour éviter de s’attirer les foudres de la capitale à l’avenir. Voilà de quoi nourrir encore ses inquiétudes à propos de la raison précipitée de sa visite…

Ses justifications lui allèrent droit au cœur. Au-delà de la vulnérabilité évidente qui exultait de ses paroles, le message de fond était criant de vérité. La démone savait, ce qu’il en coûtait de paraître normal aux yeux des autres après avoir passé près d’un siècle à vivre parmi les humains. Mais se fondre dans la banalité était une tâche ardue quand on baignait dans l’altérité. Jamais les hommes ne l’avaient tout à fait accepter, elle et ses tares démoniaques. Elle digérait son discours d’un air pensif, en laissant sa cigarette se consumer lentement. Ce petit était bien plus touchant qu’elle ne l’avait imaginé. Elle avait beau avoir vécu tant d’années, ce genre d’échange spontané et honnête, la marquait toujours avec la même émotion. A bien reconsidérer les choses, Ash était tout bonnement irrécupérable…

« Tu as raison, c’est fatiguant de chercher à plaire. » reconnut-elle avec un demi sourire mélancolique et teinté de dérision. « Mais tu sais, je crois que ça vaut le coup, parfois, de s’y casser les dents. Il y a des sourires plus tendres que d’autres, des personnes agaçantes qu’on arrive pas à repousser, des comportements qu’on ne comprendra jamais, et pourtant, on ne cesse jamais de jouer le jeu. Et tu sais pourquoi ? »

Elle prit une courte pause pour reprendre une bouffée de son poison habituel et projeta de se servir une tasse de café bien noir pour accompagner les plaisirs. Le son du liquide chaud doucement versé dans la tasse en faïence avait quelque chose de rituel et d’hypnotique.

« Parce qu’on est pas faits pour être seuls, aussi frustrant que ça puisse paraître. Alors je suis sûre que tu finiras par t’y accommoder auprès de quelques personnes et que tu trouveras quelqu’un que tu aimerais avoir dans ton entourage, de façon irrationnelle et naturelle, je t’assure. »

Les leçons allaient bon train, alors même qu’Ashandra était un cas désespéré en matière de relations. Même quelqu’un d’aussi angoissé que lui finirait par trouver un ou deux amis sur qui compter avec le temps, sans pour autant parler d’âmes sœurs. Ça faisait longtemps qu’Ash ne croyait plus à ces conneries, et qu’elle s’était convaincue qu’aucun être providentiel ne l’attendait quelque part pour recevoir tout son désordre sentimental. Le café, brûlant, lui piquait à peine les lèvres quand elle en bu plusieurs gorgées. Elle était immunisée de par sa nature à ces choses-là.

Un rire sympathique et un peu râpeux sortit de cette même bouche en voyant l’embarras de son petit protégé face à ses remarques moqueuses. Elle se demandait bien ce qu’il pouvait aimer dans ces tissus en particulier, ou s’il avait simplement sélectionné les premiers vêtements à portée par défaut sans se préoccuper de leur matière. Alors que la démone songeait à lui poser sérieusement la question, l’inconnu se décida enfin à se confier sur son malheur du jour. Elle l’écouta attentivement sans lui couper la parole, une fois de plus fascinée par les exploits de l’oisillon qui semblait découvrir le tumulte de la vie urbaine pour la première fois de sa vie.

« Je comprends, ça fait beaucoup de choses d’un coup, quand on est sensibles à tous ces détails. » reconnut-elle, compatissante. « C’est la première fois que tu viens dans le quartier à cette heure-ci ? » demanda t-elle cette fois-ci avec curiosité.

Plus elle discutait avec lui, et plus la survie de ce petit être lui semblait improbable. Perdue dans ses pensées, la démone se résolut à écraser son mégot et finir le fond de sa tasse avant de fouiller dans son bureau. Elle sortit un calepin, qui lui servait d’agenda et le tourna sur une page neuve qui ne contenait aucune annotation, suivi d’un stylo à encre noir et argenté, aux couleurs de la devanture de la boutique.

« Regarde. » dit-elle de manière anticipée en commençant à s’avancer vers lui, son butin en main.

Elle s’arrêta à un bon mètre avant de s’asseoir à son tour sur le sol. Ash se savait grande comparé au commun des mortels, encore plus quand elle était perchée sur ses talons. Pour ne pas intimider encore davantage son interlocuteur, la démone s’était mise à sa hauteur. Elle tendit le bras pour qu’il puisse suivre avec elle ce qu’elle s’apprêtait à faire.

« A force de traîner ici, je connais bien le quartier et ses heures de pointe. Alors autant t’éviter de mauvaises surprises, si ça peut aider. »

D’une grosse écriture un peu penchée, la démone se mit à consigner les horaires à éviter pour chaque jour de la semaine en les reportant dans la case du semainier tracé par ses soins sur des feuilles pointillées. Une fois terminé, elle arracha le volet pour le lui tendre. Avec ça, ce petit angoissé pourrait éviter le plus gros de l’affluence du quartier, s’il décidait de revenir dans le coin. Avec une certaine curiosité bienveillante, Ashandra profita de ce court instant pour étudier le visage de son interlocuteur. Il lui semblait bien humain, derrière ses attitudes de biche effarouchée.

« Comment tu t’appelles ? » le questionna t-elle spontanément d’une voix douce, afin d’éviter de compenser à l’avenir avec des surnoms animaliers en tout genre. « Moi, c’est Ashandra, mais tu peux m’appeler Ash, si tu préfères. »

C’était souvent plus facile à retenir, les noms démoniaques n’étant pas les plus naturels à se remémorer pour les humanoïdes. Ash était le diminutif de prénoms humains beaucoup plus communs et qui lui donnaient l’impression de se fondre un peu mieux dans la masse humaine. Chose dont elle ne souffrait pas avec ce drôle d’énergumène, qui ne la rejetait pas. Pour l’heure, la démone était aux anges d’accueillir un autre animal blessé dans sa boutique, ainsi bien loin de balayer devant sa porte...



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A peine lui avais-je expliqué le problème que j’avais avec les gens qu’elle essayait de me faire le plaidoyer de la socialisation. Je ne pus réprimer une grimace, mal à l’aise, me refermant un peu plus profond sous les couches de vêtements pour trouver un peu de support. Certes, jusqu’à maintenant la discussion s’était bien passé (et c’est pour ça que je ne me fermais pas entièrement à la discussion), elle avait l’air plus intelligent que la plupart des gens, mais là, je ne pouvais pas la croire. Ce refrain, je l’avais déjà entendu -plusieurs fois !- en écoutant les conversations des gens au dehors (les murs sont fins au quartier Nord).

“L’amitié c’est génial”, “trouver les bonnes personnes ça change la vie”, “je me trompais en restant tout seul…” Facile à dire, quand on prend des risques, que tout tourne pour le mieux et qu’on vient de gagner le gros lot ! Ceux qui ont pris des risques et qui ont perdu ; ils ne sont pas là pour en témoigner. Dans le meilleur des cas, ils sont chez eux, dans leur lit, en train de ressasser leurs echecs et en se promettant de ne plus jamais prendre le même risque. Moi, le risque je l’ai déjà pris, pleins de fois, à une époque où je pensais encore que je pourrais me défaire de la solitude. Et puis, même quand je ne veux pas prendre ce risque et que je la joue défensive et en retrait, je me retrouve quand même à l’hôpital après une mauvaise rencontre qui me fait cracher le sang !

Bon, par contre, c’est vrai que si je n’étais pas sorti, je n’aurais peut-être pas trouvé l’info pour aider ma plante… Mais bon, la lumière, franchement, j’aurais probablement trouvé tout seul ! J’avais juste paniqué un peu, c’est tout, j’aurais fini par me calmer. Je ne l’aurais pas laissée se faner, de toute façon. Et puis euh, c’était sympa de parler avec Loreley, certes, mais j’avais quand même perdu un temps fou ce jour-là ! Une journée que j’avais dû rayer : complètement irrattrapable. Qui sait l’impact que cela aurait sur la quête de l’Ordre, maintenant. D’ailleurs, je devais perdre du temps de ma journée, là, tout de suite. Il faudra que je travaille plus longtemps ce soir. J’avais besoin de calculer quelque chose…

Plus tard, après avoir acquiescé à mes explications sur mon expérience du dehors, elle me demanda si j’avais l’habitude de venir ici. Je haussai les épaules, car je n’étais pas sûr. C’était peut-être la première fois, probablement, même, mais c’était aussi possible que non. J’avais passé ma vie ici, j’avais donc dû m’aventurer à droite ou à gauche des fois, même si je n’étais jamais resté loin de ma fleur trop longtemps (ça m’a pris un certain temps, et la maîtrise du changement de forme, avant d’envisager de pouvoir la rempoter). Sauf que je ne prêtais jamais beaucoup attention aux lieux, surtout en ville, donc je ne les gardais que très peu en mémoire. C’est… sans doute pour ça que je me perdais souvent, d’ailleurs, mais il y avait juste trop de choses en ville : trop de gens, trop de chemins que je connaissais pas, trop de boutiques où je ne sais pas ce qu’on vend et comment sont les marchands, trop de bruit, trop de lumière… Puis, on risque aussi de faire de mauvaises rencontres, ou des rencontres tout court, donc je préfère éviter. Et puis, je n’avais même pas d’argent à dépenser dans des futilités. Je n’aimais que les librairies, et les endroits où on vend du papier ou des classeurs.

En parlant de papier, voilà qu’elle s’éclipsait. Je me demandai un court instant si ne pas lui avoir répondu l’aurait pu la vexer, mais elle revint vite avec un papier entre les mains. En général, on ne met pas les gens dehors avec un papier (ou alors, uniquement quand vous avez un contrat de travail ou de logement), donc je ne m’en inquiétai pas trop, tendant l’oreille. Elle garda une certaine distance que j’appréciai, mais tendis le bras pour me montrer ce qu’elle écrivait. L’encre était étrange, moins riche que la plupart des encres de Portal, comme si le stylo savait exactement de quelle quantité il avait besoin. L’avait-elle ramené de son monde à elle ?

Oh, euh, je devrais probablement faire attention à ce qu’elle écrivait, aussi, c’est à dire les heures d’affluence du quartier. J’appréciais l’attention, mais ça ne corrigeait pas mon problème, vu que moi je sortais pour ma fleur.

- Il faut que sorte aux alentours de midi, fis-je en secouant la tête. On m’a… On m’a dit que ma fleur avait besoin de lumière naturelle, et c’est la période de la journée où il y en a le plus. Donc si je sors maintenant, je perds moins de temps de travail, puisque je peux sortir moins longtemps pour le même taux d’ensoleillement. Hier, elle était toute flétrie, et elle l’est même encore un peu, regarde ! dis-je en écartant un peu les tissus autour de moi pour qu’elle puisse la voir, alors que je la tenais toujours sur les genoux. Pas assez pour qu’elle la prenne (sait-on jamais).

Elle avait meilleure mine qu’hier, elle se dressait plus haut et les fleurons semblaient moins lourds, mais les feuilles étaient encore un peu jaunes et bouclaient un peu. Ça me rappelait que j’étais en train de perdre du temps ici, à l’ombre. Un temps qui n’était ni travaillé, ni à prendre le soleil. Pourtant, je ne me sentais pas encore prêt à sortir. Si seulement j’étais plus fort que ça, et que je pouvais rester dans la lumière pendant des heures sans problème !

Finalement, elle aborda un sujet qui aurait probablement dû être abordé beaucoup plus tôt, les présentations. Je n’aime pas me présenter à des étranger, mais ça faisait déjà quelques minutes que je la connaissais, donc je ne la considérais plus vraiment comme une inconnue. Ça ne me dérangeait donc pas autant. Je m’éclaircis la voix pour me donner un peu plus d’assurance tout de même :

- Moi c’est Marguerite. Comme… Comme la fleur, oui.
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Voilà que le petit oisillon se fermait maintenant comme une huître. Au fur et à mesure de son sermon, Ashandra voyait les épaules de son drôle d’invité se tasser, faisant diminuer visuellement l’amas de vêtements qui le recouvrait. Cette scène loufoque lui rappelait étrangement les bonhommes de neige qui commençaient à fondre en hiver, avant de ne constituer plus qu’un tas d’accessoires dans la poudreuse. Sauf qu’ici, le jeune homme dont il était question était bien fait de chair et d’os et qu’on était en pleine saison estivale. La démone sourit devant ce spectacle ridicule, imaginant sans mal la petite bouille renfrognée de son interlocuteur sous les pans de tissus. Il pouvait bien bouder, ça ne changeait en rien la véracité de son propos. Elle avait l’habitude de ce genre de réaction et ne se laissait plus désarçonner par ces attitudes puériles, sauf de la part de ses amant.es qui n’avaient curieusement pas droit à la même clémence.

Puisqu’il n’avait pas renchéri sur ces faits, Ash s’était contentée de poursuivre tranquillement son interrogatoire, allant même jusqu’à lui proposer des solutions. Son anxiété sociale n’était pas à prendre à la légère et la démone se surprit à se demander ce que cette foutue psy’ aurait fait à sa place. Finalement, elle aurait dû être attentive pour tenter, enfin, de comprendre la singularité humaine. Sans se décourager pour autant, la démone avait achevé de griffonner des horaires d’affluence sur son semainier avant d’essuyer un refus poli et moins timide qu’escompté. Son interlocuteur semblait davantage intéressé par son stylo bic, vestige d’un objet qui traînait dans son sac à main lors de son invocation, que par la feuille de papier. Dans un geste sophistiqué, Ashandra fit faire une petite pirouette au stylo entre ses doigts, avant d’appuyer sur la gâchette de la mine qui cliqueta de manière satisfaisante. C’était un tour vieux comme le monde, qu’elle avait appris dans son ancienne vie lors des après-midis de travail ennuyeuses au bureau.

Ravie de son effet, Ash consentit finalement à reprendre son sérieux habituel. Pour éviter toute distraction, le stylo avait trouvé sa place dans une de ses poches. Cette histoire de fleur la laissa un instant songeuse. Pour une raison qui lui échappait, son petit protégé semblait tenir à cette sorte de grosse pâquerette plus qu’à sa propre vie. D’un côté, cela compensait agréablement le manque de sensibilité qu’elle voyait souvent chez ses pairs masculins. Mais de l’autre, quand elle songeait au fait que son invité prenait plus soin d’une fleur qu’aucun humain n’avait pris soin d’elle, il y avait de quoi désespérer… Plus elle vivait et moins elle comprenait les hommes.

« Cette fleur a bien de la chance. » dit-elle avec une pointe de sarcasme qui devait sans doute lui échapper. « ...D’avoir un propriétaire qui pense davantage à son ensoleillement qu’à se nourrir. » railla t-elle avec un soupçon de bienveillance retrouvé.

C’était finalement une belle métaphore de la relation qu’elle n’aurait jamais. C’est en tout cas de quoi la démone était convaincue. Ash n’y connaissait rien en botanique. Les seules fleurs qui se trouvaient dans sa boutique étaient brodées sur des vêtements. Elle ne voulait pas faire l’offense à son interlocuteur de lui demander s’il avait pensé à consulter un.e expert.e à ce sujet. Si tel était le cas, jamais cet hyper-anxieux ne s’infligerait un pareil programme pendant les heures de pointe. Tandis qu’elle observait la pauvre fleur qui faisait triste mine, la démone reporta ses yeux malicieux sur son interlocuteur. Il s’appelait donc Marguerite, quelle drôle de coïncidence.

« Vraiment ? C’est adorable ! » conclut-elle avec emphase.

Les Bah’Ruul l’avaient habituée à des noms de feu et de sang, avec des significations violentes qui seyaient à ceux de son espèce. Jamais les démons ne s’affubleraient de prénoms aussi doux aux connotations végétales. Bien résolue à aider cette autre fleur, Ashandra se releva avant de lisser les quelques plis qui s’étaient formés sur son pantalon enduit après s’être assise.

« Marguerite... » dit-elle à la fois songeuse et pleine de résolution. « J’ai exactement ce qu’il te faut. » conclut-elle en claquant des doigts sous l’impulsion d’une idée neuve.

Sans attendre de réponse de sa part, la démone s’élança à nouveau dans le cœur de sa boutique. Près du comptoir, elle ouvrit un tiroir qui contenait plusieurs accessoires. Ils n’étaient pas à vendre, faute de fournisseurs réguliers, mais lui servaient à accessoiriser ses tenues ou celles de ses clients, pour qu’ils puissent se projeter sur un ensemble coordonné. Quand il lui avait parlé de marguerite, Ashandra avait immédiatement pensé à une monture particulière qui se mariait à merveille avec le style bohème. Tout sourire, Ash sortit la fameuse paire de lunettes de soleil, dont les verres étaient cerclés de pétales de marguerite.

« Voilà qui devrait déjà faire l’affaire. » dit-elle satisfaite en venant donner la monture à son invité.

Lui laissant le temps d’appréhender l’objet, la démone patienta jusqu’à ce qu’il les mette sur le bout de son nez. Reculant de manière stratégique, la démone acquiesça d’un air grave avant de donner sa sentence.

« Je suis désolée de te l’apprendre mais elles sont faites pour toi ! Le style est un peu avant-gardiste mais avec ça, impossible pour qui que ce soit d’oublier ton prénom. » lança t-elle en riant doucement de bon cœur.

Elle lui apporta finalement un miroir de main pour qu’il puisse se familiariser avec son reflet. Avec une paire de lunettes de soleil sur le nez, la lumière devrait moins le gêner à l’avenir.

« Il te faudrait aussi un chapeau. » affirma t-elle en étudiant déjà mentalement plusieurs propositions.

Elle pensait qu’un couvre-chef serait effectivement un bon compromis pour le préserver du soleil et cacher son champ de vision de la foule. Le pauvre homme n’avait pas vraiment son mot à dire et pour cause, la machine Ashandra était lancée. Toujours à quelques mètres de son modèle, la démone prit des mesures fictives en fermant l’œil droit et en encadrant ses traits entre ses doigts. Son visage était plutôt rond, une physionomie plutôt arrangeante pour justifier des bords larges, plus à même de le protéger et de mettre ses traits en valeur. Mais puisqu’il n’était pas bien grand et imposant non plus, il lui fallait une couronne haute et des bords moyens pour ne pas tasser sa silhouette. C’est donc tout naturellement qu’Ash jeta son dévolu sur un Fedora dans des nuances de brun foncé, qui se marierait parfaitement avec les yeux légèrement cuivrés de son modèle. Le chapeau appartenait à  l’ancienne collection de printemps et se destinait à rejoindre la pile des invendus qui servaient de dons à l’orphelinat. Un fait que la démone se gardait bien de répéter pour ne pas infantiliser davantage son petit protégé.

« Parfait. Je te trouve très élégant. » confirma t-elle en vérifiant visuellement le tombé du chapeau après qu’il l’ait vissé sur sa tête en penchant la tête d’un côté puis de l’autre. « Qu’est-ce que tu en penses ? » demanda t-elle finalement en le laissant à l’étude de son reflet.



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J'étais sonné, sidéré, bouche-bée, hypnotisé par ce qu'elle faisait avec le truc qu'elle utilisait pour écrire. Cela ne sentait pas la magie, et ça ne sentait pas Portal non plus. Bon, si ça ne marchait pas à l'essence, alors je pourrais peut-être l'utiliser, moi aussi.

- Je peux l'avoir ? Demandai-je finalement, surpris de ma politesse, pour une fois.

De toute façon, empêtré comme j'étais dans les tissus, sortir ma main était plus compliqué que de simplement demander gentiment.

Puis, elle écouta ce que j'avais à dire sur ma fleur, et elle dit même qu'elle avait de la chance, ce qui me fit assez plaisir, je dois l'avouer. Puis elle mentionna quelque chose d'autre, qui attira mon attention :

« ...D’avoir un propriétaire qui pense davantage à son ensoleillement qu’à se nourrir. »

Je me demandai un instant ce qu'elle voulait dire par là, jusqu'à réaliser la présence d'un creux dans mon l'estomac. Ah. Ce n'était pas l'heure pour moi de manger (je le faisais le matin et le soir) mais j'avais tellement été pris dans l'engouement, la préparation mentale pour sortir aujourd'hui, que j'en avais oublié de manger quelque chose. Ça, puis le stress du dehors, je ne m'étais pas du tout rendu compte que j'avais faim. Quelle journée pathétique, franchement.

Après avoir parlé de noms, et surtout avoir expliqué mon problème d'emploi du temps, la dame, ou "Ash", je suppose, sembla avoir une idée et se releva. Allait-elle chercher un autre outil pour écrire ? J'aimerais bien. La voilà justement qui ouvrait un tiroir pour y farfouiller ! Le nécessaire à écrire, on le range souvent dans les tiroirs, alors c'était possible, c'était même probable ! pensai-je en me décalant un peu pour mieux voir, le cœur battant.

Elle en sortit... des lunettes. J'étais déçu. Puis, je remarquai la forme familière (quoiqu’un peu caricaturale) de ces lunettes. Oh. C'était pour moi ? Voilà qu’elle me les tendait justement, attendant sans doute que je les mette. J'avais déjà vu des bipèdes avec des lunettes, je savais comment ça se portait. J'en avais même déjà essayé, avec des verres transparents. Je les avais "empruntées" à quelqu'un qui avait eu le dos tourné à ce moment-là, mais on voyait tout flou et ça faisait mal aux yeux, donc je n'ai jamais vraiment saisi le principe. Les gens font vraiment des choses bizarres pour être à la mode, c'est consternant.

Mais bon, elle avait été gentille jusqu’à maintenant, et au lieu de se moquer de mon prénom, elle m’avait même offert quelque chose, spécialement pour lui. Je pouvais bien faire semblant… Je sortis donc mes mains de couches de tissus, quelque peu difficilement, pour atrapper les lunettes qu’elle me tendait. Je les examinais un instant, jetant un rapide coup d’œil à l’original qui avait inspiré leur design, qui était toujours sur mes genoux, avant de prendre une profonde respiration et de les mettre sur mon nez.

Oh. Il fait tout noir. Je les relève, pour vérifier que ce n’est pas la lumière qu’on a éteinte, mais non, ça vient des verres. Huh. Je les remets. Je secoue la tête pour vérifier, mais je ne vois même pas flou. Ça ne donne même pas mal à la tête voir… ça fait du bien, même ? La boutique n’était pas très éclairée de base, mais avec ça sur le nez, c’est encore mieux. Je me croirais presque dans mes Archives ! Ça fait… Ça fait du bien, oui. J’ai les tissus qui me tombent des épaules, maintenant que j’ai les bras sortis, mais je ne m’en soucie même pas. Je la regarde, presque aussi stupéfait que tout à l’heure, je ne sais pas trop quoi dire, ou quelle expression je suis sensé faire. Elle ne m’en tiens pas rigueur, cependant, et elle me tend un miroir, maintenant. J'ai l'air... différent. Je vois toujours, mais les autres ne voient presque plus mes yeux, je me rends compte. Est-ce que ça veut dire que je n’ai plus besoin de regarder les gens dans les yeux ? Je n’ai plus besoin de m’inquiéter que mon sourire n’atteint pas mes yeux, que j’ai des cernes, que je fronce trop les sourcils ?

J’ai à peine le temps de me remettre de mes émotions qu’elle repart chercher autre chose, je n’ai pas trop compris quoi, mais après la plume étrange et les lunettes, je suis prêt à tout accepter comme une fleur attends la pluie. Elle revient alors, munie cette fois d’un couvre-chef. Je suis quand même un peu perplexe ; il ne pleut pourtant pas, dans la boutique. Mais je l’attrape quand même : après tout, je suis prêt à essayer n’importe quoi, vu sa liste de succès. Le chapeau est léger, il ne serre pas trop. Je regarde le miroir à nouveau : maintenant on ne voit presque plus mon visage. J’ai l’impression d’être caché-mais-à-découvert, protégé, mais sans que les gens se plaignent que je ne soit pas là. Je n’ai jamais vu une seule de mes sœurs porter un chapeau ou des lunettes, en général c’est mal vu de porter trop de vêtements et de cacher son visage, alors je n’y avais jamais pensé. Je ne sais pas ce qu’elles diraient si elles me voyaient comme ça, mais j’aurais peut-être moins peur de ce qu’elles diraient, maintenant que j’avais ce casque protecteur. Peut-être que je pourrais en trouver à ma vraie taille aussi, mais pour l’instant, en avoir pour celle-là c’était déjà un bon début. Maintenant, si seulement il existait des lunettes pour les oreilles…

- Je… Je pense que…

Je ne savais vraiment pas quoi dire, ou comment l’expliquer. Je m’accrochais à ma chemise pour ne pas gesticuler dans tous les sens, et finalement je bredouillai le seul mot qui me vint à l'esprit :

- M-Merci. Je peux les garder ? P-Pour dehors, je veux dire. Euh… Est-ce qu’il faut que je les paie ?

Ça me faisait de l’argent en moins pour les classeurs. Mais je ne voulais vraiment pas repartir sans, alors sur le coup, il me sembla que les classeurs pouvaient attendre encore quelques salaires. Avais-je seulement pris mon argent ? Je me défis prestement des tissus dans lesquels je m’étais embourbé, tâtant mes poches pour une bourse ou quelques pièces égarées. J’y trouvais quelques unes, ça n’avait pas l’air d'être beaucoup, mais je les tendais à la boutiquière :

- Si y’a besoin de plus, je peux aller en chercher.
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Tout le monde avait ses obsessions. Pour Ashandra, il s’agissait des vêtements, des sacs à mains et des relations à sens unique. Jamais encore pourtant, elle n’avait rencontré des collectionneurs de stylos. Elle devait bien reconnaître que ce caprice là était plus sain et moins onéreux que les siens. La démone se targua de son effet avec un petit rictus triomphant avant de ressortir de sa poche l’objet tant convoité. Elle l’étudia un instant, sans émotion particulière, en songeant qu’elle en avait d’autres et que celui-ci n’allait pas spécialement lui manquer. C’était surtout le plus présentable qui traînait dans ses affaires, les autres bics faisant pâle figure avec leur capuchon nerveusement mâchouillé. Enfin, comment pouvait-elle résister à ces yeux d’enfants aussi émerveillés qu’un soir de réveillon ? Si les humains de son monde d’origine avaient su qu’un simple stylo bic suffisait à rendre un gosse heureux, les parents auraient tôt fait de ne plus se ruiner. C’est sur cette pensée amusante que la démone céda finalement son stylo argenté à son amateur de calligraphie. Il en ferait sûrement meilleur usage qu’elle, de toute façon.

Après les stylos, c’est une autre lubie originale qu’elle découvrit chez son interlocuteur : l’entretien de cette drôle de pâquerette que Marguerite traînait avec lui comme un animal de compagnie. C’était bien la première fois qu’elle croisait quelqu’un qui promenait une fleur. Plus rien ne l’étonnait pourtant à Portalia. Et puis c’était un passe-temps qui ne faisait de mal à personne. Pour une raison ou une autre, son petit protégé ignora sa remarque sur le déjeuner. Ashandra se mit à froncer légèrement des sourcils, cherchant chez lui des indices de satiété. Avait-il mangé ce matin au moins ? Pensait-il à se nourrir correctement et régulièrement ? Il fallait dire qu’il n’était pas bien épais pour un jeune homme dans la fleur de l’âge. Non, Ash, ce n’était pas le moment de le sur-couver, le pauvre petit était déjà assez effrayé comme ça. Comment espérait-elle qu’il la laisse s’approcher si elle retombait dans ses travers de mère surprotectrice ? Toutes ses pensées fusèrent jusqu’à se réduire en une seule et unique question.

« Mais ça ne t’empêche pas vraiment de manger, n’est-ce pas ? » demanda t-elle de façon rhétorique plus pour se rassurer elle-même que par véritable curiosité.

Les considérations alimentaires furent bientôt loin derrière, maintenant que Marguerite l’avait inspirée. Sans même lui laisser le temps de se remettre de ses émotions, Ashandra avait réussi à lui mettre des lunettes de soleil sur le bout du nez et un chapeau sur la tête. D’ici à ce qu’elle lui refasse toute sa garde robe, il n’y avait qu’un pas. Mais voilà, elle ne pouvait pas s’emballer tant que son client ne lui avait pas donné son approbation. Parfois, l’œil de la styliste voyait des merveilles là où ses modèles ne voyaient que la résurgence de leurs complexes. C’était un spectacle désolant dans lequel la démone se sentait souvent impuissante. Elle savait alors que c’était son rôle de guider ces âmes en peine vers l’autel du bon goût, ainsi n’était elle pas avare en compliments après les essayages. Marguerite n’y faisait pas exception, avec ses traits doux et presque enfantins qui portaient bien les accessoires, à condition de bien choisir leur forme.

Les yeux plein d’étoiles en attendant le verdict, la démone attendait patiemment sa réponse derrière les balbutiements. Un large sourire se dessina alors sur son visage. Ça lui plaisait, suffisamment pour qu’il veuille porter l’ensemble immédiatement en sortant. Il n’y avait pas meilleur sentiment de satisfaction que de voir ses rares clients décider de troquer leur tenue du jour contre les pièces qu’elle avait choisi spécialement pour eux. Sa réjouissance se mua en indulgence, quand elle le vit lui tendre maladroitement quelques Gils qu’il n’avait sans doute pas prévu de dépenser. Ashandra était bien des choses, mais pas une marchande malhonnête, contrairement à ceux qu’elle voyait pulluler dans le quartier nord. Leur tour de passe-passe préféré consistait à fourrer un objet dans la poche des passants, pour finalement crier au vol et au scandale et profiter ainsi de la gêne occasionnée pour leur faire payer un prix indécent. Ash n’était pas faite du même bois et ses années d’errance dans les bas quartiers ne l’avaient pas rendu plus cupide qu’elle ne devait l’être.

« Non, je ne peux pas te les vendre. » dit-elle tranquillement en songeant au fait que ces articles ne faisaient plus partie de la collection actuelle. « Alors considère ça comme un cadeau. Si tu tiens tant que ça à me rendre la pareille, pense à moi et ton entourage la prochaine fois que tu devras acheter ou faire réparer des vêtements. » lâcha t-elle avec un clin d’œil complice.

S’il devait laisser des Gils dans sa boutique, ils seraient honnêtement dépensés, pour des articles qui n’étaient pas destinés au rebut ou à alimenter sa surconsommation d’accessoires de mode.

« Oh, et si on te demande, ça vient d’ici et d’une vendeuse absolument géniale. » ajouta t-elle pleine de dérision en farfouillant machinalement dans ses tiroirs pour trouver des allumettes et embraser une deuxième cigarette dans la foulée.

La démone avait quelques scrupules à faire de lui de son homme-sandwich mais il n’y avait pas de petit profit. Surtout quand son bon cœur l’empêchait bien souvent de capitaliser sur ses services. Finalement, ce n’était pas plus mal que ses contrats exigent des compensations équivalentes pour fonctionner, sans quoi Ash se ferait tout bonnement plumer, elle et son foutu altruisme. Ce n’était pourtant pas faute de s’y casser les dents.

« Je fais aussi des retouches, du sur-mesure et des commissions à partir de croquis ou description. » dit-elle pour faire l’étalage de ses compétences et des possibilités, si quelqu’un daignait venir sur ses recommandations.

Elle ne pouvait s’empêcher de penser que son discours sonnait le glas de son désespoir. Ce n’est pas parce qu’elle lui avait donné un chapeau et une monture qui lui plaisaient que la boutique allait décoller pour autant. Mais les plans sur la comète n’étaient pas réservés aux humains, si ?



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Après y avoir songé un instant, elle me tendit finalement le stylo. J’hésitais un instant, surpris. Elle… Elle me le donnait réellement ? Juste parce que je l’avais demandé !? D’habitude, les gens ne faisaient jamais ce que je leur demandais (même si je le faisais gentiment) ! Bon, pensais-je en sortant un bras des tissus, je ne comprenais pas vraiment ses raisons, mais puisqu’elle me le tendait, je n’allais pas me faire prier. J’examinai l’engin un instant, le faisant tourner du bout des doigts. Il avait un aspect métallique, mais il était léger. J’appuyai sur l’espèce de bouton au bout, comme je l’avais vue faire, qui fit le même petit clic que j’avais entendu. Ça faisait sortir la pointe en bas.

Clic clic clic clic clic…

Il faudra que je lui réserve la plus belle place dans mes archives, pensais-je devant ce génie technologique. Quoique, avais-je le droit d’exposer quelque chose qui n’avait pas trait aux rois du chaos aux archives des interdits ? Je ne savais pas. Je n’avais pas demandé. Il faudra que je demande à Jerolin. J’espère que oui.

Clic clic clic clic clic clic clic clic clic clic clic clic clic clic clic…

J’adore ce truc. Pris dans mon élan, j’essayai de faire un rond avec comme elle l’avait fait, mais je me ratai et l’envoyai valdinguer un peu plus loin, où il toucha le sol avec un cliquetis léger. C’était plus dur que ça en avait l’air…

Plus tard on en vient aux présentations, et à la nourriture.

« Mais ça ne t’empêche pas vraiment de manger, n’est-ce pas ? »

Je penchai la tête sur le côté, confus, et un peu anxieux. Comment savait-elle que je n’avais pas mangé, ce matin ? Je me tortillai de gêne dans mon cocon, n’étais pas trop sûr de ce que je devais répondre. Et puis d’abord, pourquoi ça l’intéressait ? Était-ce parce que j’avais fait tomber le truc pour écrire, tout à l’heure ? Ou pour avoir sifflé ce verre d’eau d’une traite ?

- J’ai juste oublié de manger ce matin. D’habitude je mange une fraise, mais ce matin j’étais trop concentré. C’est pas grave, je vais me rattraper ce soir.

Je savais en me levant que je devrais sortir et que ça ne serait donc pas une journée normale. Et quand une journée n’est pas normale, alors je ne sais plus ce que je suis censé faire. Ma fleur tire encore un peu la tête en plus, ça me coupe l’appétit de la voir comme ça.

Après le sujet des noms, et celui de l’habillage. Une fois les essayages faits, je me retrouvais donc à tendre mon argent, désespéré de la convaincre qu’elle me laisse garder tout ça. Elle m’avait donné l’écriveur, aussi, devrais-je le payer lui aussi ? Serait-il plus cher, moins cher ? Entre l’écriveur, le chapeau et les lunettes, si je devais n’en choisir qu’un, ou deux, je ne savais vraiment pas lesquels. J’espérais ne pas avoir à choisir. Est-ce qu’elle pourrait me les garder de côté peut-être ? Est-ce que je pouvais demander un peu plus de salaire à l'Église ? Mais pour recevoir plus de salaire il faudrait que je travaille plus, et là je n’étais justement pas en train de travailler…

Et puis elle… n’acceptait pas mes pièces ? Du tout !? Mon sang ne fit qu’un tour. Comment ça, elle ne pouvait pas me les vendre !? Mais on était dans sa boutique, non, pourquoi ne pouvait-elle pas vendre ses propres articles ?! Ça n’avait aucun sens ! J’avais déjà eu le temps de penser tout ça, qu’elle s’expliquait finalement.

C’était un… cadeau ? Du genre… gratuit ? Pour moi ? … Pourquoi ? Je n’avais rien fait depuis que j’étais là, au contraire. J’étais rentré sans prévenir, j’avais joué avec ses vêtements, et je l’avais empêché de travailler. Pourtant, la voilà qui me donnait des choses gratuitement, juste parce que je les demandais. Elle ajoutait seulement que je devrais juste penser à elle la prochaine fois que j’achèterai un vêtement.

Je ne comprenais pas. Juste penser à elle, ça lui suffisait ? Elle ne le saurait même pas, que je pensais à elle, à part si elle était télépathe. Était-elle télépathe, justement ? Y’en a plusieurs à Portalia, y’en a même un à la Guilde, j’ai entendu dire. Ou peut-être qu’elle se nourrissait simplement des pensées des gens. Elle avait l’air humaine, mais à Portal on ne sait jamais trop ce qu’on a devant soi (même moi, je ne suis pas sous ma vraie forme tout de suite). Je n’avais pas spécialement envie de me faire dévorer mes pensées : même si c’est vrai que des fois j’en ai tellement que ça devient difficile de réfléchir, ça n’a quand même pas l’air agréable de s’en faire manger un morceau. Enfin, si elle ne mangeait que les fois où je pensais à elle, ça devrait aller, je suppose. Ça valait bien mes trois cadeaux. Je hochai donc de la tête.

Elle précisa de dire que lesdits cadeaux venaient d’ici (logique), et d’une vendeuse “géniale”.

- Toi… Enfin vous, vous voulez dire ? Je demandais, juste pour être sûr d’avoir bien compris (heureusement, je m’étais souvenu d’être poli, et de vouvoyer), parce que c’était un peu étrange de parler de soi à la troisième personne du singulier..

Elle ajoutait qu’elle savait coudre les vêtements aussi. Je me demandais si elle avait cousu le chapeau, aussi. Les lunettes, probablement pas, parce que ça ne se coud pas les lunettes (enfin je crois pas, je ne sais pas comment c’est fait). Je réfléchis un instant. Moi je n’avais pas besoin d’autre vêtements (sauf si elle avait d’autres envies géniales), mais peut-être que je pourrais demander à Jerolin. Il porte toujours les même vieilles robes.

Cependant, c’est une autre idée qui me vient tout à coup.

- Vous aurez des trucs comme ça, dis-je en pointant du doigt mon chapeau et mes lunettes, du genre… très petit ? Beaucoup plus petit ? je pinçai les doigts, estimant la taille qu’il me faudrait si je voulais porter ce genre de choses à ma taille réelle.
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Qui aurait pu deviner qu’un simple stylo pouvait suffire à rendre un homme heureux ? Ash ne put s’empêcher de céder à l’impulsion d’un énième sourire devant ce spectacle attendrissant. Son petit protégé semblait ravi d’avoir échoué d’un simple bic, tout affairé qu’il était à l’examiner sous toutes les coutures en usant et abusant du clic. Comment ne pas lui offrir dans ces circonstances ? Puis la démone se mit à rire de bon cœur en voyant le stylo valdinguer dans la pièce suite à une mauvaise manœuvre de son nouveau propriétaire. Le geste était maladroit, exécuté trop rapidement et sans la technique nécessaire pour le faire tournoyer. Ashandra s’amusa de la situation, en allant ramasser l’objet avant de le faire exécuter à nouveau une parfaite rotation en équilibre entre son pouce et son index. Elle le rendit au jeune homme avec un clin d’œil tranquille, celui-là même qui trahissait un art ancestral et la mystification d’un mouvement somme toute trivial. Son regard, faussement grave, lui intimait l’insatisfaisante vérité. Ça demande des mois d’entraînement, petit. Rien qu’il ne pourrait accomplir un jour à force de journées interminables.

Ash avait profité de cet aparté pour s’enquérir sur la santé de son interlocuteur, qui lui semblait bien frêle pour un humain. Sa déconsidération pour la nourriture et son aveu nonchalant eurent tôt fait de la faire bondir intérieurement. Oublier de manger n’était pas un argument valable pour la démone qui y voyait, une fois de plus, une mise en danger pour l’étonnante créature qui, elle commençait à en être persuadée, n’avait survécu ici que par chance et miséricorde. Marguerite lui rappelait Six sur l’aspect alimentaire, quand elle avait du apprendre au louveteau les bases de l’alimentation humaine. Comment les humains faisaient-ils pour être à la fois aussi brillants et mauvais ? Personne ne leur inculquait les bases élémentaires de la survie dans leur éducation ? Les yeux argentés de la démone s’étirèrent à nouveau, gommant progressivement les traces de la surprise et de la révolte présentes dans son regard.

« Ce qu’il ne faut pas entendre... » commença t-elle en soupirant devant tant d’inconscience. « Tu sais ce que tu risques en oubliant de t’alimenter ? De tomber dans les pommes, au beau milieu de la foule. » dit-elle en insistant évidemment sur la pire prophétie envisageable pour lui pour le sensibiliser aux dangers encourus. « Et puis si tu ne manges qu’une fraise de toute la matinée, c’est pour ça que tu ne grandis pas davantage. » s’enquit-elle en secouant la tête d’un air consterné.

Il avait de la chance de l’avoir prise par les sentiments en lui parlant chiffons… Ashandra refusa toute compensation pour le chapeau et les lunettes et ne put s’empêcher de faire un parallèle entre la maigre poignée de pièces et l’alimentation drastique du jeune homme. Peut-être qu’il n’avait tout simplement pas les moyens de s’offrir plus qu’un fruit le matin ? Lui offrir des accessoires de seconde main était donc le moins qu’elle puisse faire pour soulager un peu son quotidien. Sa décision était prise. La démone pouvait se montrer particulièrement têtue une fois résolue, les Bah’Ruul en étaient témoins. Elle repoussa gentiment la petite main remplie de Gils d’un air entendu. Marguerite semblait complètement décontenancé par sa décision, ainsi se sentit-elle obligée de se justifier pour ne pas lui donner l’impression qu’elle le prenait en pitié.

« Je ne vends pas de lunettes puisque je ne travaille pas le métal. Tout ça, c’est juste une partie de ma collection personnelle. » dit-elle avec un rictus mi-triomphant mi-autocritique, la surconsommation d’accessoires étant son fort et sa malédiction. « Et pour le chapeau, il s’agit d’un invendu de l’ancienne collection, qui finit généralement par être donnée à l’orphelinat du quartier nord. Tu comprends pourquoi je ne peux pas te les vendre ? Ça ne serait pas très honnête de ma part. » conclut-elle d’une voix sage.

La nouvelle remarque de son interlocuteur éclipsa l’inquiétude et le sérieux de la démone qui se fendit d’un nouveau rire. Ce gamin n’était pas possible. Son anxiété le poussait à toujours confirmer des évidences et à s’assurer du degré de dérision des paroles qu’il entendait.

« Bien sûr ! Qui d’autre ? » lâcha t-elle en venant coincer entre ses lèvres une nouvelle cigarette encore éteinte. « Tu en connais d’autres, toi, des couturières absolument géniales à Portalia ? Non, puisque la place est déjà occupée. » dit-elle avec une certaine malice en se désignant elle-même du pouce.

Elle n’avait même pas essayé de ménager le suspense en laissant une pause entre ses questions et la réponse apportée. Marguerite se mit tout de même à jouer le jeu en lui suggérant un projet qui projeta dans ses yeux mornes un éclat intrigué. Des accessoires miniatures ? Pour quoi faire ? Personne ne lui avait encore fait de demande aussi farfelue. Et c’est justement pour ça que la démone lui accorda toute son attention, en reposant finalement la cigarette qui n’avait même pas encore été consumée.

« Non, mais je peux imaginer quelque chose. » dit-elle songeuse en pensant déjà à la manière de procéder. « Je pourrais sans doute improviser une monture avec des boutons pour me guider et du fil de fer… Oh, et un gros dé à coudre devrait suffire pour la circonférence du chapeau ! » lança t-elle en claquant des doigts devant cette nouvelle idée pour remplacer un faux crâne à l’échelle donnée par Marguerite.

Sans crier gare, Ashandra se mit à griffonner sur papier les quelques idées et croquis qui se profilaient dans son esprit créatif avant de poser sa mine graphite et de soutenir sa tête au niveau du menton, accoudée sur le comptoir.

« C’est pour qui ? Un animal de compagnie ? » demanda t-elle, curieuse, en imaginant aucun Portalien de cette taille dans toute la cité. « Si c’est un véritable projet, il faudra revenir me voir ~ Pour les essayages et les ajustements, principalement. »

Son enthousiasme était palpable. Non content de lui donner de la compagnie et une occasion de se montrer surprotectrice, son petit protégé lui donnait maintenant du travail. Inutile de dire que la démone prenait un malin plaisir à exécuter les idées folles de ses clients, surtout quand elle les appréciait particulièrement. Et Marguerite avait déjà une place privilégiée dans son cœur puisqu’il s’agissait de son premier vrai client qui n’avait pas mandaté ses services à partir d’une recommandation ou du bouche à oreille. Le pauvre… dans quoi s’était-il engagé ? On avait pas idée d’ouvrir un commerce en ayant le cœur aussi mou.



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Elle me rendit le stylo… non sans le refaire tourner au passage, et je ne pus m'empêcher de souffler un petit "waouh" du bout des lèvres. Embarrassé, je saisis prestement le stylo sans rien dire et le mis immédiatement dans ma poche. J’en avais fait assez, et je n'osais pas renouveler l'expérience devant un public de si tôt, la tâche avait l'air de nécessiter de la pratique. Je m’entraînerai aux Archives, quand il n'y aura personne.

Puis vint le sujet de la nourriture. L'espace d'un instant, elle eut l'air très en colère, et je ne compris pas pourquoi. Voulait-elle me proposer à manger… ? Avais-je été impoli… ? Je ne comprenais pas. Après les gâteaux de Ryza, j'étais un peu méfiant à l'idée d'accepter de la nourriture en public, au cas où je rendais le contenu de mon estomac sur quelqu’un encore.

Et voilà qu'elle parlait de grandir, maintenant. J'étais plus perdu encore. D'autant que mes sœurs m'avaient déjà dit que la raison pour laquelle je n'arrivais pas à créer une forme aussi grande qu'un humain moyen, c'était à cause de mon manque d'essence. Même chose pour les vêtements, mes sœurs n'ont pas de soucis avec ça, mais moi je n'arrive pas à créer de tissus, sinon ça m’épargnerait beaucoup de problèmes.

… Insinuait-elle donc que manger plus de fraises me donnerait plus d'essence ?! J'avais du mal à le croire. Je n’avais encore jamais entendu parler d’une telle technique, et pourtant croyez-moi, y’en a beaucoup à Portalia qui tueraient pour obtenir plus d’essence. Littéralement, même : y’a plein de missions qui consistent à tuer des trucs, et ils se jettent dessus en espérant devenir plus fort que leur voisin. C’est presque la seule technique qui semble marcher à coup sûr, pour peu qu’on survive aux dits combats.

Mais les fraises ? Non, je n’en avais jamais entendu parler. Et puis, si ça marchait, j’aurais dû débloquer une essence beaucoup plus tôt, justement. En plus, je n'étais pas sûr d'avoir l'estomac assez gros pour une deuxième fraise quotidienne, honnêtement. Pourtant je n’osai rien répondre, sans doute à cause de son regard de tout à l’heure : je ne voulais pas risquer de la mettre en colère à nouveau.

Heureusement, nous changeâmes prestemment de sujet, pour en venir aux vêtements qu’elle m’offrait. Elle disait qu’elle n’avait pas fabriqué les lunettes elle-même, donc elle ne pouvait pas les vendre. J’étais là encore un peu confus, je ne savais pas qu’on ne pouvait pas vendre ce qu'on avait pas fabriqué nous même. Ça changeait un peu mon point de vue sur certains marchands de la ville. Je me demandais à partir de quelle étape de confection on pouvait dire qu’on avait vraiment “fabriqué” quelque chose.

Oh, et apparemment elle avait bien parlé d’elle-même à la troisième personne.

- Je ne fais pas beaucoup les boutiques, fis-je en haussant les épaules, regardant à nouveau les quelques pièces dans ma main, avant de les remettre dans ma poche. Peut-être que je pourrai acheter ces classeurs, finalement… Donc je ne savais pas.

Je lui demandais alors si elle n’avait rien à taille plus… féérique, ce qui sembla soudainement l'animer. Elle ressemblait même un peu à moi quand je rangeais quelque chose, ou que je trouvais une nouvelle encre. J'aimais bien voir les gens comme ça, c'était un des rares moments où j’avais l’impression de pouvoir comprendre ce qu’ils pouvaient ressentir, même si je ne partageais pas la même passion pour les vêtements.

Elle me demandait pourquoi je cherchais des articles à cette taille, si c’était pour un animal de compagnie. J’avais du mal à penser à un animal de compagnie qui ferait cette taille-là… Un oiseau, peut-être ? Ça existe, les oiseaux de compagnie ? Je ne sais pas. Je ne connais pas bien les oiseaux. Je m'imagine mal faire ami-ami avec un oiseau.

Malheureusement, mon envie de rétablir la vérité et d’être clair et précis me pris de vitesse à cet instant.

- Non, ce n'est pas pour un animal, c'est pour… Ah !

Je m’arrêtais avant d’en dire trop. Ma vraie forme était censée rester secrète. Si jamais on savait ce que j’étais, à quel point j’étais petit et faible, alors on s’en prendrait à moi et puis on… Je ne sais plus. Quelque chose en rapport avec le fait que les fées sont parfois chassées par certains invoqués ? Je crois.

C’est là que les événements de ces dernières semaines me revinrent en mémoire. D’abord il y avait eu Jerolin. Comme d’habitude, il n’avait rien dit, il m’avait juste demandé si j’aurais besoin d’aide parfois, à cause de ça, si ça ne me fatiguait pas trop de garder l’illusion, si je voulais avoir un endroit à l’abri des regards où on ne me verrait pas quand j’avais besoin de faire une pause. Les trucs que Jerolin fait d’habitude, quoi.

Puis, il y avait eu Loreley. Je m’étais transformé un peu dans le feu de l’action, juste pour prouver quelque chose, un argument probablement stupide que j’avais déjà oublié. Je me souvenais en revanche qu’elle n’avait rien dit. La conversation avait continué comme si de rien n’était.

Après il y avait eut le renard. Là aussi, ça avait été un accident, plus physique que mental. Je n’avais pas voulu me transformer, et ça aurait pu très mal se terminer, surtout dans mon état. Et pourtant… Il n’avait rien dit non plus. Et il ne m’avait rien fait. Ses trois jumeaux ou je sais pas quoi non plus, ils n’avaient rien dit, il n’avaient rien fait. Ils m’avaient même aidé.

Et puis ensuite il y avait eu Ryza. Là aussi c’était un peu un égarement, j’étais tellement paniqué au sujet de ma fleur, et puis je ne sais pas pourquoi, je m’étais persuadé que c’était une fée elle aussi… Finalement, elle ne m’avait rien fait non plus. Elle m’avait même… complimenté je crois ? Elle avait des livres sur les fées et tout…

Est-ce que… Est-ce que je me serais monté la tête pour rien, toutes ces années ? Non… Il devait bien y avoir des gens mal intentionnés à Portal. J’en avais vu. Mais est-ce que Ash était un de ceux-là ? Elle m’avait donné un écriveur super cool et des vêtements, et elle m’avait laissé tranquille là à faire n’importe quoi avec ses vêtements.

Je pense qu’elle n’était pas un de ceux-là, conclus-je, avant de prendre une profonde inspiration et de retirer les derniers vêtements dans lesquels je m’étais emmitouflés pour ne pas me retrouver prisonnier en dessous.

- C’est, euh… Ça serait pour moi, parvins-je à balbutier à grand peine alors que je levais l’illusion.

Je n’osai pas la regarder tout de suite, probablement tout rouge d’embarras. J’avais réussi à trouver assez de courage pour le faire, mais pas assez pour faire face aux conséquences, manifestement.


Dernière édition par Marguerite du Psychagité le Dim 17 Déc - 1:18, édité 1 fois
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Maintenant que le stylo avait changé de propriétaire, Ashandra s’adonna à l’art du sermon qu’elle ne connaissait que trop bien. Aussi maternelle et intrusive qu’à l’accoutumée, elle s’intéressait d’un peu trop près au régime alimentaire de son petit protégé. D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, la démone n’avait jamais entendu parler en un siècle d’existence de la moindre espèce se nourrissant exclusivement d’une fraise en tout et pour tout. Et pour ne rien arranger à son cas, Marguerite garda scrupuleusement le silence, plus confus que jamais. Tu y es allée trop fort, Ash, regarde sa petite bouille contrite. C’était pourtant plus fort qu’elle.

Devait-elle s’en inquiéter plus que de raison ? Probablement. Maintenant que le sujet avait été évoqué, impossible d’ignorer les conséquences de son aveu. La démone ne cessait de faire des passerelles entre sa pâleur, ses bras minces, sa faible composition et son alimentation. Les biais de confirmation se multipliaient dans son esprit, derrière l’écran de ses yeux alarmés. Elle s’était résolue à ne pas insister face à la mine sidérée et craintive de son interlocuteur. On ne pouvait pas forcer les autres à se livrer. Ash en avait suffisamment fait les frais pour le réaliser aujourd’hui, non sans une pointe d’amertume mal placée. Tout le monde ne voulait pas être sauvé. Elle ne s’accommoderait jamais de cette sinistre réalité.

Sa nouvelle mission vestimentaire lui occupa bientôt la totalité l’esprit, laissant derrière elle les considérations alimentaires. Sans le savoir, Marguerite avait lancé la machine inexorable de sa boulimie créative. La démone n’était pas une créature de mesure et de raison. Elle était obsédée par les choses qu’elle aimait et complètement indifférente au reste. Aucun compromis tiède n’était envisageable. Elle s’emportait ou se sclérosait sans jamais se laisser porter par des intérêts mous et tempérés. Ashandra ne répondait qu’à une règle pour régir ses passions. La magie ne tenait qu’à une binarité : tout ou rien.

Contrairement à ce qu’elle pensait, son petit protégé ne fit pas grand cas de l’histoire d’argent, se contentant finalement d’accepter les présents dont elle le couvrait. Rien n’était trop beau pour ses clients fidèles. Inutile de dire que l’extrapolation était prématurée. Mais qui pouvait la blâmer de chercher un peu d’espoir dans cette foutue vie ?

« Aucun problème pour moi. J’accepte mon statut de privilégiée avec grand plaisir. » rétorqua t-elle avec un clin d’œil malicieux face aux justifications maladroites de l’homme angoissé.

La démone était flattée de savoir que sa boutique était une exception à la règle. Peut-être qu’il s’agissait là même de l’essence véritable du Brûle-Pourpoint, un repère pour les excentriques et les paumés. Non, Ash, ce n’est pas le moment de recommencer à broyer du noir. Il fallait se concentrer à nouveau sur le projet de Marguerite, pour ne pas perdre des yeux l’horizon. Du fil de fer, des boutons, un dé à coudre… Les idées allaient bon train pour proposer une ébauche. Tandis qu’elle couchait les idées sur papier, son client semblait en proie aux doutes. L’avait-elle mis mal à l’aise en évoquant des vêtements destinés aux animaux ? Il serait pourtant surpris, du nombre de Portaliens qui paraient leurs compagnons de tenues et accessoires en tout genre.

Ashandra leva un sourcil interloqué face à l’interjection désespérée de son interlocuteur, cassant un instant l’inertie de sa mine graphite. Quelle mouche l’avait piqué cette fois-ci ? Elle avait beau faire l’inventaire de ses dernières interactions, elle ne voyait pas ce qui avait pu le heurter ou l’embarrasser dans ses précédents agissements. Dans une résolution curieuse, le jeune homme se découvrit enfin en se dépouillant de la pile de vêtements protecteurs. Après quelques balbutiements qui laissèrent la démone pantoise, l’apparence de Marguerite se transfigura en se miniaturisant. D’abord interdite, Ash l’identifia un instant de ses prunelles argentées avant de rompre le silence.

« J’avais raison depuis le début. » dit-elle d’un air faussement dramatique. « Tu es bien un petit oiseau tombé du nid, mais en plus majestueux. » ajouta t-elle sans ménager le suspense plus que nécessaire.

C’était probablement la créature la plus adorable qu’Ashandra avait croisé à l’intérieur de ces murs. Outre sa taille miniature, il avait de grandes ailes iridescentes qui ressemblaient aux couleurs polychromatiques des libellules. Sans se laisser décontenancer par cette nouvelle apparence, la démone se redressa et relaxa ses yeux qu’elle avait plissé afin d’examiner son interlocuteur.

« Merci. C’est beaucoup plus clair maintenant ! » lâcha t-elle en ayant retrouvé de son enthousiasme et de sa concentration.

De toute évidence, cela lui avait coûté de s’exposer ainsi devant elle, compte tenu de ses réactions et de sa timidité maladive. Il n’avait même pas daigné la regarder dans les yeux, pauvre petit. Sans plus attendre, Ash retourna à ses croquis en réfléchissant à voix haute afin de tenir compte des éventuelles objections de son client.

« Des volumes, il n’y avait que ça de vrai pour habiller une silhouette ténue. Du blanc nacré qui tire légèrement sur des reflets lilas. Oui ! Ça sera somptueux avec ces ailes. Et puis, une touche de cuir marron bien sur, pour structurer la taille et rappeler les vêtements du quotidien, ceux qui sont à échelle humaine. » lança t-elle tout de go en noircissant les pages de son carnet.

Une fois satisfaite de sa conception, la démone releva la tête de ses croquis pour passer à la partie pratique. Afin de finaliser ses patrons, elle devait connaître les mensurations de cette taille non conventionnelle.

« J’ai besoin de prendre des mesures, je peux ? » demanda t-elle doucement à son minuscule interlocuteur en sortant un mètre de couturier de son tiroir.

Il lui fallait également tenir compte de la distance et de l’implantation des ailes de son client par rapport à ses omoplates afin de tracer les fentes dorsales sur mesure. En attendant que Marguerite donne son accord, Ash entreprit de calculer mentalement une estimation du coût et du temps de conception de la tenue et du chapeau miniatures. Si elle voulait être un jour être prise au sérieux, elle ne pouvait passer à côté de ses obligations.

« Et voici le devis ~ » ponctua t-elle avec allégresse en lui tendant une feuille résumant le détail des dépenses et prestations. « Si c’est bon pour toi, tu pourras revenir d’ici une grosse semaine pour faire les dernières retouches et modifier ce qui te déplaît au besoin, même si je suis convaincue que tout sera parfait ~ »

Le client est roi, surtout au moment de payer. Et dieu sait qu’elle en avait besoin de ce fric. Surtout quand on ne pouvait s’empêcher d’offrir à tout va et de dépenser le double des recettes en shopping thérapeutique… La clé, pour pousser les clients à l’achat, c’était de les accompagner jusqu’au bout du processus, sans quoi les hésitations pouvaient les faire changer d’avis à la dernière minute. Difficile de refuser une fois que les choses étaient arrivées à terme et que la vendeuse se montrait aussi enthousiaste. Ash ne lésinait pas sur les moyens, et pour cause, les clients qui lui passaient commandes n’étaient pas monnaie courante. La démone ne connaissait que trop bien ces techniques  dont elle avait été elle aussi bien trop victime lors de ses achats compulsifs. Mais qui pourrait sérieusement lui en vouloir ? N’était-elle pas après tout la meilleure couturière du quartier ?



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Bon, bah… J'avais eu raison, elle ne me faisait pas de mal. Où plutôt avais-je eu tort ? Puisque c'est ce que j'avais cru pendant si longtemps ? Je ne savais pas trop quoi en penser. J'aurais presque préféré qu'elle m'attaque, pour justifier un minimum cette croyance, au moins.

Parce que là, je me sentais carrément stupide.

Afin de ne pas endommager mon ego plus qu'il ne l'était déjà, je décidais pour le moment de considérer tout cela comme une exception à la règle, même si j'étais conscient que ça commençait à faire beaucoup d'exceptions.

Avait-elle donc eu raison plus tôt, en parlant de devoir apprendre à faire davantage confiance ?

Cela me vexait grandement.

Mais ça ne me vexait néanmoins pas plus que ses mots ne m’embarrassaient.

"Tu es bien un petit oiseau tombé du nid, mais en plus majestueux."

- …!!!

Bon, passons sur la comparaison avec un oiseau ; je ne suis évidemment pas un oiseau, et je ne sais pas pourquoi elle dit ça, ce n’est pas comme si je faisais ami-ami avec les oiseaux ou quoique ce soit. Certes, mes sœurs m’ont déjà dit que j’avais une cervelle de moineau, mais ce n’est pas une raison. J’ai rien à dire à un moineau, moi. Je ne sais même pas de quoi on parlerait.

Mais ce n’est pas le problème ici présent. C’est surtout la fin de la phrase qui m’interpelle.

Majestueux ? Moi ?! Non vraiment, je n'y comprend rien, et d'entendre ça j'ai l'impression qu'une boule de feu s'était formée entre mes deux oreilles.

On n'a sans doute pas la même définition de majestueux, je me dis. Ça arrive des fois, les gens ne sont pas bons avec les mots, ou alors les invoqués ont des concepts différents. Elle avait un écriveur super spécial, donc elle doit venir d'un monde super différent. C'est logique, et ça suffit à faire redescendre la température de mes joues de quelques degrés au moins.

Moi qui demandais juste un chapeau, ou des lunettes, la voilà qui dessinait… des vêtements. Une tenue entière. Pendant un temps, je ne compris pas en quoi des vêtements me protégeraient de la lumière et amélioreraient quoi que ce soit, puis je réfléchis.

Attendez, si je la laisse faire… je pourrais avoir mes propres habits ? Du genre, sous cette forme aussi ? Comme sous forme humaine, mais… petit ?

Ce n'est pas que je n'aimais pas mon uniforme, non. Il représentait que je venais d'une marguerite, après tout, et je ne cherchais pas à m'en cacher. C'est juste que… des fois, ça me paraissait bizarre de porter la même chose que les autres, comme si on était pareil, alors que… ben, on l'est pas quoi. Manifestement, qu’importe mes efforts pour me fondre dans la masse. Alors je l'avais reprisé un peu, modifié tant bien que mal. Ça n'avait pas plu à la vieille Pivoine du tout d'ailleurs, et c'est pour ça que des fois, je préférais juste ma forme humaine : au moins personne ne pouvait se plaindre que je ne ressemblais pas assez à une fée, vu que ce n'était pas une forme de fée. On me comparait moins aux autres.

Alors du coup je ne dis rien, je la laissai faire, prendre mes mesures, tout ça. J’étais un peu curieux quand même. Je ne pensais plus du tout aux classeurs pour lesquels j'économisais, j'avais l'impression qu'un tout nouveau monde s'ouvrait à moi. Peut-être que les passions c'était contagieux, qui sait ? Je n'avais pas l'habitude des gens passionnés, du moins pas autant que moi je pouvais l'être. Si c'est contagieux, ça expliquerait pourquoi personne ne voulait m'entendre en parler. Je me demandais si un jour j'arriverai à infecter quelqu'un avec les miennes… Les maths, peut-être. Je n'ai jamais personne pour parler de maths. Ça serait bien…

Enfin bref, visiblement j’allais avoir mes propres vêtements. Et c’est tant mieux que je ne pensais plus tant que ça aux classeurs, parce que si je comprends bien, j’allais devoir les payer, cette fois. La somme me paraissait peut-être un peu élevée, au sens où je n’étais pas sûr de réunir assez d’argent d’ici une semaine. Évidemment, mes sœurs n’approuveraient pas du tout, donc je ne pouvais pas leur demander, mais peut-être qu’en demandant à Jérolin de me prêter un peu d’argent…

Dire qu’en me levant ce matin, j’étais bien loin de penser chiffons, et j’étais terrifié à l’idée de devoir quitter mon travail même une heure. Et voilà qu’en une simple rencontre, j’avais un chapeau, des lunettes, et d’ici une semaine peut-être, toute une nouvelle tenue. Et bien que la rencontre ait commencé plutôt… sous de mauvais auspices, au moins de mon côté, il faut dire que je ne la regrettais pas, étrangement. Huh. Ceci dit, en parlant de travail…

- …!!!

J’avais complètement oublié ! Combien de temps j’étais resté là ? Ça aurait pu être 5 minutes, ça aurait pu être 3 heures, je n’en avais aucune idée. Je ne savais pas combien de temps j’avais perdu, combien de documents ne seraient pas classés aujourd’hui alors qu’ils auraient dû l’être. Cette pensée m’effarait : et si la papesse apprenait que j’avais négligé mes fonctions ? Et si j’écopais d’un blâme, ou pire, j’étais renvoyé !? Avant d’être consumé par ces pensées catastrophiques, je reprend forme humaine : il faut que je rentre au plus vite !

Sauf que voilà, c’est une des nombreuses, nombreuses situations où j’aurais dû réfléchir davantage, ayant oublié que je ne savais pas matérialiser de tissus sous cette forme. Je me retrouve donc dans mon plus simple appareil, juste devant Ashandra. J’ai à peine le temps de lâcher un juron et, intelligemment, j’attrape les vêtements dans lesquels je m’étais emmitouflé auparavant pour lui lancer à la figure pour ne pas qu’elle voit ce que, j’ai appris, est immontrable aux gens. J’enfile ensuite mon pantalon aussi vite que je peux, et je détale, ma fleur sous un bras et le reste de mes habits sous l’autre.

Ça ne va pas me créer une ambiance bizarre pour dans une semaine, hein… ?

...

Voilà, c'est exactement pour ça que je n'aime pas rencontrer des gens ! Ça finit toujours comme ça !
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descriptionPar Couches Successives [PV Ashandra] (Terminé) EmptyRe: Par Couches Successives [PV Ashandra] (Terminé)

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